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eFuel : nous avons testé le carburant synthétique de Porsche

Après des annonces prometteuses, Porsche assure détenir la recette d’un carburant décarboné destiné aux véhicules thermiques. Bien avant sa mise en vente au public, nous avons pu tester cette essence dépourvue d’énergie fossile, capable d’alimenter n’importe quelle voiture essence.

efuel : nous avons testé le carburant synthétique de porsche

Alors que nous pensions entérinée la loi visant à interdire la vente de véhicules thermiques en Europe dès 2035, l’Allemagne et d’autres pays réfractaires montent au créneau pour faire retravailler le texte avant son abrogation. Parmi les points de frictions entre partisans et dissidents, l’absence d’une dérogation pour les voitures capables de rouler aux carburants végétaux et synthétiques. C’est-à-dire… presque tous les véhicules thermiques, de la voiture à l’avion en passant par les navires pétroliers.

Pour nos voisins d’outre-Rhin, un brin protectionnistes envers leur puissante industrie automobile, cette souplesse de l’Europe est capitale puisqu’elle permettrait aux constructeurs d’obtenir un délai avant la mise au ban irrévocable des moteurs à explosion et, peut-être, trouver de nouvelles alternatives pour une mobilité individuelle décarbonée.

Pionnier dans le développement et la production de carburants sans pétrole, Porsche, en partenariat avec d’autres acteurs de l’énergie comme ExxonMobil, a fait sortir de terre à grand frais une usine au Chili dévouée à la fabrication d’une alternative « écolo » au sans-plomb, dont l’élaboration n’empiète pas sur les terres cultivables, à l’inverse de l’éthanol utilisé aujourd’hui de certains biocarburants comme l’E85. Malgré 100 millions d’euros invertis, le constructeur allemand n’ambitionne pas d’inonder le marché à courte échéance.

Première étape pour ce carburant, alimenter les véhicules engagés dans des disciplines sportives comme la Supercup. Dans un 2ème temps, la production sera mise à contribution dans les réservoirs des véhicules Porsche neufs sortis des usines et attendant d’être livrés à leurs propriétaires. 550 millions de litres seront produits chaque année à partir 2026, soit une part infime de la consommation mondiale de carburant. À défaut de pouvoir supplanter rapidement le sans-plomb, la firme de Zuffenhausen ambitionne d’atteindre la neutralité carbone dès 2030 et ce carburant pourrait être la clé de ce pari.

Du vent à la roue

Nous avions déjà expliqué le fonctionnement de l’e-Fuel dans un précédent numéro d’Auto Moto (AM 307), il convient toutefois d’en rappeler le principe. Grâce à de l’électricité produite par le vent, abondant dans la région du Chili où est se dresse l’usine Porsche, l’électrolyse transforme l’eau en hydrogène. L’H2 crée se voit mélangé à du CO2 capté dans l’air et devient du méthanol, qu’un raffinage spécifique par adjonction de produits chimiques va convertir en carburant aux propriétés et à l’indice d’octane identiques au SP 98. La quantité de CO2 émise lors de la combustion de ce e-Fuel est quasiment identique à celle captée lors de sa fabrication, contrairement à l’essence issue du pétrole dont le CO2 provient des sous-sols et se trouve rejeté dans l’air, participant au réchauffement climatique par effet de serre, selon les scientifiques.

Voilà pour la théorie. Mais dans les faits, comme fonctionne une voiture alimentée au carburant de synthèse ? Pour le savoir, nous avons pris les commandes d’une 718 GT4 RS fonctionnant avec un e-fuel proche de celui qui sera produit dans l’usine chilienne de Porsche. « Quitte à mener une expérience au volant d’une voiture, autant en choisir une qui ait d’la gueule », aurait dit un certain Doc.

C’est par temps froid, sur le circuit glace de Val Thorens, que nous sommes conviés prendre le volant de ce véhicule annoncé comme vertueux malgré ses prestations sportives. D’ailleurs, son style très démonstratif réchauffe immédiatement l’ambiance. Il faut toutefois garder la tête froide, puisque nous sommes ici pour découvrir, peut-être, l’un des carburants du futur. Une fois au volant, le pilote instructeur assit sur le siège de droite semble avoir totalement oublié à quoi « tournait » cette GT4 RS. Sans recommandation particulière, suggère simplement de mettre le contact et de s’élancer sur la glace. En réalité, il y a effectivement peu de raison de tourner autour du pot.

La mise en route du 6 cylindres est immédiate malgré la température négative ce matin-là, et le véhicule s’anime sans mal. Aucune odeur ne vient importuner le conducteur ni même les autres journalistes patientant en bord de piste en attendant leur tour. La sonorité est également la même, les passages de rapports sont fluides, les reprises impressionnantes bref, le test se transforme rapidement en partie de plaisir sur glace vive.

Tout ça pour ça, nous direz-vous ? Oui… Mais il est tout de même possible de tirer plusieurs enseignements de cette expérience. Déjà, ce carburant de synthèse semble prometteur puisqu’il se substitut sans peine à l’essence traditionnelle. Son utilisation est simple, et son transport similaire à celui du sans-plomb ou du gazole. Reste que son réel impact environnemental doit encore être démonter s’il veut convaincre les hautes instances européennes. Par exemple, les particules et substances polluantes potentiellement émises lors de sa combustion ne sont pas connues. L’autre frein, c’est son prix puisqu’il coute aujourd’hui environ 10 dollars le litres et pourrait, d’après Porsche avoisiner les 2 $/l d’ici 203O… hors taxes.

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