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Essai Renault R5 Turbo 3E : coup fumant

essai renault r5 turbo 3e : coup fumant

Où et quand ?

Le 23 mars à Magny-Cours. Pas sur la piste GP, encore mieux, sur le circuit Club où je réalise tous les essais chronos de Motorsport depuis plus de 15 ans. Bref, à la maison ! Ciel voilé mais de la douceur et une piste sèche.

Le pitch

En pleine célébration des 50 ans de la R5, Renault sort l’an dernier de son chapeau un show car dont le panache frise le (génial) pétage de plomb. Le nom Turbo 3E renvoie évidemment à la légendaire R5 Turbo et le slogan « Née pour le drift » va de pair avec le look parfaitement déjanté. L’idée de la marque est de capitaliser sur son patrimoine sportif pour nous préparer un avenir 100 % électrique mais pas 100 % triste. La recette : un vrai châssis de voiture de course, un couple géant (et instantané) sur les seules roues arrière, un frein à main hydraulique, des ailes surgonflées et des Gopro en pagaille.

essai renault r5 turbo 3e : coup fumant

Premier regard

La Turbo 3E est au moins aussi spectaculaire en vrai qu’en photos. Et pour cause, elle est large comme une Lamborghini Aventador, longue comme une Clio et haute comme une Porsche 911. Sandeep Bhambra, responsable du design des concept-cars Renault, et son équipe se sont appliqués à transposer en 2022 les galbes et les proportions de la R5 Turbo originelle (25 cm moins large). Avouons que le résultat fait mouche, surtout si on y ajoute un aileron façon Pikes Peak (plus gros que réellement fonctionnel), des flasques bien racing sur les jantes montées en 265 à l’arrière (325 sur la version de « salon ») et une déco disons pudiquement chatoyante. Notez que la Turbo 3E n’est pas la version bodybuildée de la Renault 5 Prototype qui préfigure elle (à 90 % nous dit-on) le style de la future R5 de série.
Dans l’habitacle, on retrouve là encore une foule de clins d’oeil, à commencer par la planche de bord en deux parties et son motif écossais. On n’en reste pas moins à bord d’une voiture de course et plus encore, de drift, imposant de beaux baquet en carbone signés Sabelt, un levier de frein à main géant, un arceau cage et, cela va de soi, un ours en peluche… Positionner au niveau du genou gauche passager, le doudou baptisé « Drifty » a pour mission « de détendre et réconforter les passagers saisis par la puissance du show-car ». Quand on vous parle de pétage de plomb…

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Les chiffres (et quelques lettres)

Comme sur la Turbo originelle, le groupe motopropulseur est bien à l’arrière, mais point de cylindres ni de turbo. Les roues arrière sont entraînées chacune par un moteur électrique alimenté par un pack de batteries de 42 kWh installé sous le plancher. La puissance délivrée atteint 380 chevaux et comme toujours avec l’électrique c’est surtout le couple qui fait mal : 700 Nm disponibles en instantané ! Le dispositif a été développé spécifiquement et ne préfigure pas le futur mode de propulsion des compactes sportives de la marque.
La voiture repose sur un châssis tubulaire 100 % inédit conçu en partenariat avec Ligier et répondant aux normes FIA, recouvert d’une peau entièrement en carbone. L’ensemble pèse 980 kilos… sans les batteries qui en rajoute 520 ! Le rapport poids/puissance (ou plutôt couple) reste très favorable. Il permet à Renault d’annoncer un 0 à 100 km/h en seulement 3”5. Rappelons que la méchante Alpine A110R est donnée pour 3”9 sur cet exercice.
La vitesse de pointe plafonne à 200 km/h et en usage intensif, l’autonomie annoncée est d’une vingtaine de minutes. La recharge complète, elle, prend environ deux heures.

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Le truc en plus

La glisse ! Ce n’est pas tous les jours qu’un constructeur français met l’art du drift à l’honneur. Renault et Ligier sont allés au bout du délire et ont même fait appel à Yvan Muller, grand spécialiste dans l’art du contrebraquage, pour donner un coup de main dans le développement de la voiture. Tout est là pour voir la vie en rose par les vitres latérales.

Le râleur, il dit quoi ?

Les sifflements combinés d’un moteur électrique et d’une transmission auront toujours une fâcheuse tendance à gâcher un peu la fête, aussi folle soit-elle, et 1500 kilos pour un proto de course de 4 m de long, c’est beaucoup…

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Sur la route

Avec des Gopro à la place des phares et des rétros et pas de carte de grise, mieux vaut ne pas essayer…

Sur la piste

Nous avons eu droit à 4 tours de la piste Club de Magny-Cours au volant, avec Monsieur Yvan Muller en guise de copilote. Seule consigne : éviter les vibreurs. Pour le reste, la voiture a beau être un show car unique, elle est parfaitement fonctionnelle et se laisse piloter comme une vraie voiture de course. La position de conduite est remarquable. Face au pilote, les dix petits écrans numériques qui composent la planche réclament sans doute un bon temps d’acclimatation pour y voir clair. Yvan enclenche pour moi le mode Drive. Je lâche le frein et s’est parti dans un sifflement qui rend vite la conversation difficile dans le cockpit. La poussée impressionne forcément mais le plus bluffant pour un concept car, qui plus est voué au drift, reste le grip général de l’auto. En adoptant un pilotage propre, le comportement n’a rien de scabreux ou caricatural. L’absence de différentiel impose juste de bien garder les freins pour permettre au train arrière XXL de se placer, voire d’enrouler quand on use (avec parcimonie) de la montagne de couple. On retrouve les freins Brembo de la Mégane R.S. aux quatre coins mais faute d’assistance, la pédale réclame une généreuse pression sur la pédale à la course très réduite.

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L’efficacité et la (relative) sagesse de l’auto sont d’autant plus remarquables que les Michelin Pilot Sport 4S, aussi performants soient-ils, sont plus adaptés à la glisse qu’à la recherche ultime de grip.
Il n’en reste pas moins que dessiner de belles trajectoires et claquer des temps n’est pas la vocation première de la bête. Nous n’avons pas été autorisés à gouter aux joies du drift sur la piste. Ce privilège revenait à Yvan qui nous en a fait profiter depuis le baquet de droite. Avec des roues avant capables de braquer à 50° (c’est beaucoup), la réserve de couple, un châssis hyper équilibré et le talent du maestro, le résultat est délicieusement fumant.
Les journalistes ont tout de même eu droit de jouer un peu entre deux cônes sur une aire plane arrosée aux abords de la piste. Le frein à main magique permet de déclencher la glisse avec une précision jouissive puis une fois le dosage de gaz trouvé, je parviens à enchaîner quelques 360 au ras (et même un peu plus) des cônes avec une pensée émue, forcément, pour les gymkhanas du regretté Ken Block.

Le bienheureux, il dit quoi ?

Qu’une marque comme Renault pète à ce point les plombs, c’est le pied !

Contrat ou pas contrat ?

L’électrique sous cette forme, forcément, ça fait réfléchir et disons-le, ça peut même donner envie. Le délire est d’autant plus savoureux qu’il est bien réel et joliment maîtrisé. Luca Di Meo, le boss de Renault, ne semble pas résigné à laisser cette spectaculaire figure de style sans suite. On l’a entendu parler (difficile de savoir avec quel niveau de sérieux) de WRC et l’idée d’une héritière de la R5 Turbo bien velue ne semble clairement pas écartée. Les lendemains ne chanteront sans doute pas, mais pourvu qu’ils fument !

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