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Ferrari : des puces dans le cheval cabré

La firme de Maranello est dirigée depuis septembre 2021 par un ancien cadre de StMicroelectronics. Un expert des technologies qui va faciliter le virage le plus délicat que doit prendre Ferrari : celui de l’électrification et de la digitalisation.

C’est rare de voir un scientifique prendre le volant d’une marque automobile, et qui plus est la plus iconique du monde. Pourtant, Benedetto Vigna a été choisi par John Elkann pour diriger Ferrari. Ce diplômé en physique subnucléaire de l’université de Pise (Italie) a passé presque 23 ans chez STMicroelectronics, une multinationale franco-italienne qui fait autorité dans le monde des semiconducteurs, ces puces électroniques dont la pénurie a gravement affecté la production dans l’industrie automobile.

Spécialiste des MEMs (Micro Electro-Mechanical Systems), des composants miniatures qui intègrent des capteurs et de l’électronique, Benedetto Vigna a déposé plus de 200 brevets. Il a par exemple développé un capteur de mouvement que l’on retrouve au cœur des airbags. Il a reçu plusieurs prix et a même mené des recherches en parallèle dans un laboratoire de la prestigieuse université de Berkeley, en Californie (le BSAC : Berkeley Sensor & Actuator Center). Il aurait pu devenir patron de la R&D d’un grand groupe. Mais, il a été nommé Directeur Général de Ferrari avec la mission de faire bénéficier de sa compréhension des technologies, qui sont le moteur du changement dans l’industrie automobile.

Une organisation repensée

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4 mois après son arrivée, l’inventeur italien a remodelé l’état-major.

Il a fait venir d’anciens collègues dont Ernesto Lasalandra, qui était en charge de la R&D chez ST, et qui occupe le même poste. À noter que Philippe Krief, un français qui a piloté la recherche chez Ferrari pendant 7 ans, et qui devait être son adjoint est reparti entre temps chez Alpine, où il est directeur de l’ingénierie et de la performance produit.

Benedetto Vigna a aussi placé Angelo Pisci qui s’occupait des achats et de la qualité chez ST et qui remplit les mêmes fonctions. Il a également promu des jeunes qui étaient déjà chez Ferrari. Ainsi, David Abate – qui a travaillé chez Ducati avant de venir chez Ferrari, où il s’occupait des prototypes – est le responsable des technologies et infrastructures. Et Silva Grabelli, qui est passée par Microsoft et SAP, ainsi que par des cabinets de consulting (At Kearney, Accenture) se retrouve à la tête d’une organisation données et digitalisation.

Pour justifier ces choix, le nouveau DG de Ferrari a déclaré vouloir « repousser les frontières » et « faire preuve d’agilité pour saisir de nouvelles opportunités dans un monde qui change très vite ».

Un plan pour verdir Ferrari

Dans la foulée, en juin 2022, le nouveau pilote de la marque au cheval cabré a présenté un plan stratégique. Pas moins de 15 nouveaux produits sont attendus d’ici 2026. Mais, ce que l’on retient le plus, c’est la feuille de route pour l’électrification.

La première Ferrari électrique pour 2025

La première Ferrari 100 % électrique est attendue en 2025. Elle doit offrir les mêmes émotions qu’un modèle thermique avec des emprunts à la Formule 1 et des logiciels tournés vers la performance.

En 2026, 60 % des modèles seront surtout hybrides, mais la part de l’électrique va représenter 40 % en 2030, contre 40 % pour l’hybride et 20 % pour les moteurs thermiques (qui exploreront les carburants alternatifs). La firme de Maranello achètera ses cellules à des fournisseurs mais intègrera les batteries dans son usine et privilégiera l’allègement pour conserver la performance. Un bâtiment dédié sera consacré aux composants électriques.

Panneaux solaires et hydrogène à Maranello

La feuille de route environnementale privilégie aussi la neutralité carbone en production. Ce qui explique le recours à des panneaux solaires (3 800 sur les toits de l’usine) pour réduire les émissions de CO2 de 740 tonnes par an et charger les modèles hybrides sur site sans passer par le réseau électrique. Par ailleurs, une pile à hydrogène a été déployée pour limiter le recours au gaz.

Pas de conduite purement autonome au planning

Dans son plan stratégique, Ferrari dit vouloir développer la connectivité et optimiser l’expérience client à bord de ses bolides. En revanche, le plaisir de conduite sera maintenu. Ainsi, les systèmes d’assistance ne dépasseront pas le niveau 2+, afin de préserver les émotions. Il y aura bien de la technologie de pointe, mais avec une approche qui exalte avant tout ce qui fait la singularité de la marque. Le volant n’est pas près de disparaître.

Un accord avorté avec Qualcomm ?

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La Scuderia Ferrari avait accueilli en 2022 le logo de la puce Snapdragon sur sa monoplace de Formule 1. Le partenariat avec Qualcomm concernait également les voitures de route avec un premier sujet de coopération autour des cockpits connectés. Les deux partenaires devaient par ailleurs explorer de nouveaux champs d’applications autour de la technologie.

Las, l’écurie de F1 n’a pas voulu prolonger cet accord pour la saison en cours. Et du coup, c’est Mercedes-AMG PETRONAS F1 qui récupère ce sponsor, dans le cadre d’un partenariat qui va courir sur plusieurs années. L’histoire ne dit pas si ce revirement remet en cause l’intégration dans les voitures de route de puces de la firme américaine, qui reste un acteur incontournable de la digitalisation dans l’automobile, que ce soit dans l’habitacle ou pour les aides à la conduite.

Un avant-goût du futur

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En novembre dernier, Ferrari a créé la surprise en élaborant sa première voiture de sport virtuelle : la Visio Gran Turismo. Développée pour le jeu de PlayStation, cette monoplace fait la jonction entre un glorieux passé (les prototypes des années 60 et 70), des technologies actuelles (le moteur V6 de la 499 P, générateur et aérodynamique issus de la Formule 1) et des innovations à venir. On retient par exemple la présence de trois moteurs électriques apportant une puissance supplémentaire de 326 ch aux 1030 ch du moteur, pour un couple de 1 100 Nm.

Devenir aussi efficace que Tesla

Mais, ce qui impressionne aussi c’est le volant, au design très moderne et dont l’interface homme-machine permet au pilote d’avoir les infos essentielles et de se concentrer sur la route (ou la piste). Benedetto Vigna, qui a reconnu le mérite d’Elon Musk d’avoir bouleversé l’industrie avec Tesla et accéléré les processus de décision, veut se montrer tout aussi efficace. Reste à voir si la greffe va prendre. Au sein de l’écurie de F1, où il joue un rôle plus influent, l’ambiance est plutôt tendue. Pour ce qui est de gestion de la marque, la prochaine Assemblée Générale est prévue le 14 avril.

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