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Ford et Tesla, vers le déclin de l’empire américain ?

ford et tesla, vers le déclin de l’empire américain ?

À la roulette de Detroit, rien ne va plus pour Ford, l’inventeur de la production à la chaîne. Elles sont loin, les cadences infernales brocardées dans Les Temps modernes de Charlie Chaplin. Aujourd’hui, chaque voiture électrique qui sort d’une usine Ford coûterait au constructeur la bagatelle de 122 000 euros, de quoi espérer ne plus en vendre, ce qui paraît aller contre le cours de l’histoire.

Et, en effet, les ventes de véhicules électriques ont chuté de 20 % au premier trimestre et les revenus de la division qui les produit de 84 %. Pour parer au plus pressé et réduire l’hémorragie dévoilée par Crain’s Detroit Business, relayé par Reuters, le constructeur de Dearborn a lancé un véritable SOS à ses fournisseurs afin qu’ils recherchent toutes les solutions à même de réduire les coûts. Dans une note confidentielle qui leur est adressée, Liz Door, directrice de la chaîne d’approvisionnement de Ford, leur fait clairement comprendre qu’ils sont tous sur le même bateau.

«Â Nous avons tous beaucoup investi dans le succès de l’activité des véhicules électriques et nous gagnerons ou perdrons tous ensemble », dit-elle, lucide, dans cette note. « C’est dans notre meilleur intérêt que nous soyons en mesure de fournir des produits électriques abordables à nos clients », a ajouté Door. « Pour assurer la compétitivité, il est d’une importance primordiale que notre portefeuille atteigne d’autres niveaux d’efficacité des coûts matériels. »

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Quelque peu embarrassée par cette fuite, l’entreprise a, en langage plus diplomatique, admis dans un communiqué : « Nous apprécions la collaboration de nos fournisseurs et leur avons demandé de partager leurs idées de réduction des coûts. » Une litote. Le programme de hausse des droits de douane du président Joe Biden sur les importations de voitures fabriquées en Chine ? ce qui implique aussi quelques modèles non chinois ? ne suffit donc pas à protéger le constructeur américain, engagé tardivement sur la voie de l’électrification.

Tesla descendu dans l’arène

Ce n’est pas le cas de Tesla, qui fait figure de précurseur, mais celui-ci se trouve lui aussi pris dans la mêlée de la vague chinoise qui l’a poussé à anticiper une guerre des prix trop tôt, trop vite et de nature à susciter le désarroi de ses propres clients. En effet, ceux qui ont acheté juste avant la dégringolade des tarifs se retrouvent avec une voiture Tesla négociable à forte perte et concurrencée en occasion par le même modèle neuf. Cela vaut pour les particuliers mais aussi pour les sociétés de leasing européennes, déjà agacées par la faiblesse du service client et le coût comme la lenteur des réparations. Deux domaines que Tesla a volontairement négligés, préférant déployer un réseau de recharge plutôt que de concessionnaires. Un choix stratégique avisé mais ponctuel.

Les baisses répétées des prix de détail de Tesla ont fait chuter la valeur des flottes de loueurs que Tesla cherche aujourd’hui à retenir. Selon Reuters, l’arrangement porterait sur des remises non officielles sur l’achat de voitures neuves, à condition qu’elles soient en stock. Et il y en a beaucoup. Une attention nouvelle serait portée en matière de service, de réparation et de commande après des années au cours desquelles les gestionnaires de flotte et les sociétés de leasing se sont senties négligés. Selon des entretiens de Reuters avec neuf dirigeants de grandes sociétés de leasing et de location de voitures, ainsi qu’une douzaine de gestionnaires de flottes d’entreprise, tous affirment que Tesla a ignoré ces problèmes.

Un enjeu capital se dresse pour Tesla, pour lequel les achats de flottes représentent près de la moitié des ventes en Europe. Les baisses de prix de détail de Tesla visaient à stimuler les ventes en réponse au ralentissement de la demande mondiale de véhicules électriques et à la concurrence croissante, en particulier de la part des fabricants chinois de véhicules électriques.

Les sociétés de leasing achètent des voitures neuves et concluent des contrats de location calculés en fonction du prix auquel elles pensent pouvoir les vendre à la fin du bail. Des baisses soudaines des tarifs du neuf ont bousculé l’équation et réduit ces valeurs résiduelles, ce qui a coûté de l’argent aux sociétés de crédit-bail. Tesla, sorti de sa tour d’ivoire, doit se rendre à l’évidence, il va descendre dans l’arène pour se frotter aux vrais problèmes de la construction automobile. Et voir sa valorisation en Bourse et ses confortables marges érodées par un contexte concurrentiel féroce.

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