Déjà propriétaire de Volvo, Polestar, Lynk&Co, Lotus ou encore Smart, Geely lance une nouvelle marque en Europe : Zeekr. L’ambition est de s’attaquer aux constructeurs premiums. Notamment avec un original crossover compact baptisé X qui mise autant sur le look que sur la technologie. De quoi inquiéter les marques établies ?
La Zekr X.
Si l’on récapitule, chez Geely en Europe, on a deux labels premium, Polestar et Volvo, l’une d’ores et déjà tout électrique, l’autre rappelant à qui veut l’entendre sa volonté de le devenir en 2030. L’une vise le premium plutôt sportif, l’autre plutôt cossu et familial. À celles-là s’ajoute une marque sportive, Lotus, une marque de véhicules (péri-)urbains électriques, Smart, et une marque de SUV hybrides partagés ou non, Lynk&Co. Avouez que les différents segments du marché automobile sont déjà bien couverts. Pourtant, Geely estime qu’il reste une place pour une nouvelle marque : Zeekr. Son positionnement ? « Le premium sportif ». Comme Polestar, donc ? Oui, mais chacune des deux marques aura sa place, nous assure-t-on. Bref, difficile d’y voir clair. Surtout avec un blason sans image, élément crucial sur le segment.
Le soin du détail
Pour s’offrir une chance de réussir, Zeekr mise sur le style. La 001, déjà présentée, s’apparente à une Lynk&Co, et pour cause : c’est sous ce blason qu’elle avait été présentée, avant de donner naissance à Zeekr, afin de bien différencier hybrides et électriques. Le second modèle, lui, est 100% Zeekr. Dessiné en Suède mais produit en Chine, il prend l’allure d’un crossover compact de 4,43 mètres de long, peu ou prou le gabarit de son cousin le Volvo XC40. Mais le style est bien moins « lisse » et, disons-le, les traits un brin torturés suscitent plus l’étonnement que l’admiration. Mais nous laisserons à chacun le soin d’apprécier ou non.
En revanche, le souci apporté aux détails est indiscutable, notamment les signatures lumineuses, y compris le lettrage ZEEKR sous la lunette arrière, les poignées de portes intégrées dans la carrosserie ou encore les portières sans encadrement. Dans le montant central côté conducteur, un petit écran circulaire indique l’état de charge de la batterie lorsqu’elle est branchée.
Écrans tous azimuts
À bord, l’habitacle est épuré à l’extrême. Tout passe par l’écran central de 14,6’’. Une mauvaise habitude qui a tendance à se généraliser depuis que Tesla l’a « imposée ». L’écran se montre heureusement réactif et agréable à utiliser. Et un bandeau au bas de l’écran permet de garder le réglage de la température de clim ou des fonctions de dégivrage accessibles à tout moment.
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Heureusement, car l’ergonomie du système est compliquée, et l’on se perd dans les menus et sous-menus, ce qui se révèle énervant, surtout lorsqu’il faut y recourir pour des tâches aussi basiques que régler le flux de ventilation. Vu la taille de l’écran, on aurait aussi apprécié de pouvoir scinder l’affichage pour consulter plusieurs fonctions en même temps, ce qui n’est malheureusement pas le cas. Ajuster le multimédia masquera – par exemple – la navigation. Heureusement, le conducteur pourra toujours garder cette dernière sous les yeux via l’écran de 8,8 pouces derrière le volant, à l’affichage clair et lisible. Et si cela ne suffit pas encore, l’afficheur tête haute avec réalité augmentée dans le pare-brise, toujours très pratique, complète le panel.
Intérieur soigné mais décevant
Mais à bord, faute de boîte à gants, les espaces de rangement exploitables sont franchement comptés.
Toujours à l’intérieur, le X soigne les détails. La présentation est léchée, les ajustements précis, et les habillages translucides qui laissent apparaître l’éclairage d’ambiance apportent un côté cosy et moderne. Mention spéciale aux jolis leviers métalliques couleur bronze pour les lève-vitres, très chics, comme la boîte à lunettes sous forme de pochette en suédine. Les matériaux sont aussi de très bonne facture de prime abord, et les plastiques respirent la solidité. On émettra toutefois une réserve sur la tenue dans le temps des différents éléments : l’accoudoir conducteur de l’une des voitures essayées laissait déjà apparaître des marques de fatigue, alors que l’odomètre n’affichait que 1 600 km. La marque nous assure que cela provient du fait que les véhicules essayés n’étaient encore que des exemplaires de présérie, les véhicules finaux étant en cours d’acheminement depuis la Chine pour être livrés aux clients européens dès novembre. Enfin… pas tous les clients.
Pas (encore) en France
Pour l’heure, Zeekr se focalise en effet sur la Norvège et les Pays-Bas pour son lancement en Europe. Aucune date n’est par contre avancée pour une commercialisation en France. La marque annonce l’ouverture d’un showroom parisien en 2024, mais sans plus de précisions. Le constructeur a toutefois déjà prévu tout un écosystème autour de ses modèles, via des partenariats avec des acteurs établis pour le financement, l’entretien et les réparations, la recharge, etc. Notamment avec Plugsurfing pour donner accès à plus de 500 000 points de recharge partout en Europe.
Efficace mais ferme
Le Zeekr X est proposé en deux versions : l’une en propulsion avec un moteur de 272 chevaux et 343 Nm. L’autre en quatre roues motrices avec un second moteur sur l’essieu avant, qui porte la puissance totale à 428 chevaux et le couple à 543 Nm. Avec cette dernière, les performances sont évidemment très sportives : le 0 à 100 km/h est atteint en 3,8 petites secondes. Des performances de supercar il n’y a pas si longtemps ! Globalement d’ailleurs, l’auto se montre précise et agile dans les enchaînements de courbes, avec une direction consistante au rendu naturel. Le freinage est également puissant malgré une attaque de pédale un peu molle. Et la stabilité en courbe confirme que la plateforme SEA, commune à la Volvo EX30 et aux Smart #1 et #3 notamment est bien née. Les mouvements de caisse en conduite active sont admirablement maîtrisés, au prix d’un amortissement terriblement ferme. Trop ferme d’ailleurs pour une voiture familiale, qui devient inconfortable dès que le revêtement se fait inégal. Ce que nous avons moins ressenti sur la version à deux roues motrices également essayée. Là encore, les ingénieurs se retranchent derrière l’argument de la présérie pour justifier des différences de comportement, certains collègues semblant avoir conduit des voitures bien mieux amorties.
Et il en est de même pour les aides à la conduite, théoriquement pléthoriques, mais pour la plupart non accessibles durant cet essai. L’alerte de survitesse est en revanche bien présente. Non pas sous la forme d’un signal sonore classique, mais bien d’une petite voix vous rappelant « You’re over the speed limit » (« Vous êtes au-delà de la limite de vitesse »). Énervant, surtout lorsque le système se trompe de limite. Bref, on espère que les ingénieurs disent vrai en nous promettant que tout cela sera corrigé sur la version de série.
Autonomie et recharge : dans la norme
Côté autonomie, la batterie de 69 kWh commune aux deux versions promet 425 ou 445 km d’autonomie, à l’avantage de la version deux roues motrices. Durant notre essai, nous avons relevé une différence sensible de consommation moyenne entre les deux : 20 kWh/100 km environ avec la plus puissante, 18 kWh/100 km avec sa petite sœur. Cela, en essayant d’utiliser le plus intelligemment la récupération d’énergie au lever de pied, réglable selon trois niveaux, à la différence trop peu marquée dans la pratique. Et pour la moduler, il faut à nouveau passer par les sous-menus de l’écran central, ce qui est un non-sens. Il est également possible de choisir si l’on souhaite une conduite à une seule pédale jusqu’à l’arrêt complet du véhicule ou non (10 km/h environ).
Côté recharge, Zeekr offre ce qui se fait de mieux en courant alternatif : 22 kW AC de série. En courant continu, les 150 kW sont plus dans la norme, mais permettent toutefois de recharger de 10 à 80 % en 30 minutes. Suffisant.
Ce Zeekr X est donc une proposition qui pourra convaincre une clientèle jeune séduite par son côté technologique et que le « tout à l’écran » ne freinera pas. Le rapport qualité/prix/puissance semble plutôt avantageux dans le segment visé. Mais pour qu’il soit réellement recommandable, il est à espérer que les défauts rencontrés lors de cet essai soient effectivement gommés comme promis, car pour l’heure, le feeling « premium » n’est pas pleinement palpable.