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Tesla a-t-il perdu la bataille de la voiture autonome ?

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Tesla est-il déjà dépassé par ses concurrents en matière de conduite autonome ? Quoiqu’il en soit, les retards s’accumulent.

Conduite autonome et voiture électrique paraissent intimement liés, pour ne pas dire indissociables. La faute (ou le mérite) à Tesla, qui a très vite instillé le concept dans l’esprit du public, à tel point que le terme Autopilot est presque devenu générique au même titre que frigidaire, post-it ou abribus.

Pourtant, Tesla n’est pas le seul à proposer des voitures dites intelligentes et proposant un niveau de conduite autonome similaire. Non seulement Tesla n’est plus seul, mais il se pourrait même que la marque californienne commence a être un peu dépassée dans l’exercice, et pas seulement dans le petit monde de l’électrique, puisque les thermiques et hybrides sont aussi concernées. Il faut dire que pendant qu’Elon parle et promet, les autres bossent et délivrent. A tel point que certaines marques, comme Mercedes, sont passées devant l’américaine en matière de prestations de conduite autonome, notamment avec la berline électrique EQS.

En fait, la plupart des constructeurs planchent sur des dispositifs de conduite autonome, dont certains sont déjà très avancés (comme celui d’Audi, entre autres) mais arriver à les faire homologuer, a fortiori dans l’Union Européenne, est une autre paire de manches, que Tesla, contrairement à Mercedes, n’a pas réussi encore à valider. Certains y verront une forme de protectionnisme de la part des européens, qui protégeraient ainsi l’un de leurs ressortissants contre les assauts de l’ogre d’outre-Atlantique. Personnellement je n’y crois pas une seconde, mais cela n’engage que moi. Je crois simplement que l’Autopilot de Tesla n’est pas encore au point, et pas prêt pour le Grand Soir de la généralisation auprès du grand public.

Quels sont les niveaux de conduite autonome ?

Avant d’aller plus loin, rappelons ce qu’est le principe de la conduite autonome, et ses 5 niveaux.

Le principe de la conduite autonome en automobile est de permettre à un véhicule de conduire sans intervention humaine directe, en s’appyant sur les technologies avancées telles que les capteurs, les caméras, les radars, lidars, les cartes et les algorithmes de traitement de données pour détecter l’environnement autour du véhicule, prendre des décisions en temps réel et contrôler les mouvements du véhicule. Rappelons que Tesla utilisait jusqu’à présent les huit caméras extérieures, un radar avant et douze capteurs à ultrasons permettant des technologies de sécurité active y compris l’évitement des collisions et le freinage d’urgence automatique. Cependant, les dernières Model 3 et Model Y produites pour le marché européen font désormais appel au système Tesla Vision, basé exclusivement sur les caméras, sans radar.

Il existe 5 niveaux de conduite autonome, définis par la Society of Automotive Engineers (SAE) :

  • Niveau 0 : la conduite est entièrement manuelle, sans aucune assistance à la conduite.
  • Niveau 1 : la conduite est assistée par un système automatisé pour l’accélération et/ou le freinage (par exemple, régulateur de vitesse adaptatif) OU pour la direction (par exemple, assistance au maintien de voie).
  • Niveau 2 : la conduite est partiellement automatisée, avec un système capable d’assister à la fois l’accélération/freinage et la direction en même temps. Le conducteur doit cependant rester attentif en permanence et prêt à reprendre le contrôle du véhicule à tout moment.
  • Niveau 3 : la conduite est conditionnellement automatisée, avec un système capable de prendre en charge toutes les tâches de conduite sous certaines conditions prédéfinies (par exemple, sur une autoroute). Le conducteur doit rester attentif et prêt à reprendre le contrôle du véhicule à tout moment lorsque le système le demande.
  • Niveau 4 : la conduite est hautement automatisée, avec un système capable de prendre en charge toutes les tâches de conduite dans des conditions prédéfinies sans intervention humaine. Le conducteur peut ne pas avoir besoin d’être attentif ou de reprendre le contrôle du véhicule dans certaines situations.
  • Niveau 5 : la conduite est entièrement automatisée, sans besoin d’intervention humaine pour la conduite. Le véhicule peut fonctionner dans toutes les conditions de conduite possibles.

La question de la conduite autonome chez Tesla

Outre son savoir-faire incontesté en matière de motorisation électrique, de gestion des batteries et d’efficience, Tesla s’est illustré par le haut niveau technologique de ses voitures (les fameux ordinateurs sur roues), notamment en matière de conduite autonome, que la marque a toujours portée comme un étendard ringardisant très vite toute la concurrence.

Mais comme indiqué précédemment, entre les annonces auxquelles plus personne ne croit, les déceptions au fil des mises à jour et les retards récurrents dans l’évolution de l’Autopilot maison, Tesla est en train de se faire déborder par ses concurrents. Pire, lassés par certains dysfonctionnements du système, comme les fameux freinages fantômes qui sont bien réels et n’ont rien d’une légende urbaine, les alarmes injustifiées (et terriblement agressives et intrusives) nombre d’utilisateurs se détournent du système actuel de niveau 2, et ne l’utilisent pratiquement plus. Quant aux nouveaux arrivants, ils regardent à deux fois avant de débourser 7 500 euros pour une option qui n’apporte pas grand chose de plus que l’Autopilot « de base » installé d’origine sur toutes les Tesla, surtout en Europe où les zélés fonctionnaires de Bruxelles s’appliquent à tellement le brider qu’il en devient presque inopérant.

En dehors des autres constructeurs automobiles historiques, qui développent chacun de leur côté leur système de conduite autonome, la concurrence provient aussi des « pure players », ces entreprises très jeunes qui ne sont pas des marques automobiles grand public, mais qui se sont concentrées sur le segment prometteur des taxis et VTC sans chauffeurs.

Les GAFA se mêlent de conduite autonome, et avancent plus vite que Tesla

C’est le cas par exemple de Cruise, Uber, Zoox ou Waymo, qui travaillent sur des véhicules à capacité de conduite autonome de niveau 4, avec des caractéristiques bien différentes, et notamment un bridage géolocalisé de leur périmètre d’évolution. Des noms qui, à l’exception de Cruise, fleurent bon les GAFAM, géants de la tech et autres start-ups de la Silicon Valley.

Cruise, est une entreprise qui appartient principalement à General Motors et qui a été lancée dans la plupart des quartiers de San Francisco. L’entreprise opère des véhicules commerciaux de type VTC Uber, à cela près qu’il n’y a pas de chauffeur sur le siège avant et que vous pouvez juste monter dans le véhicule et faire un tour n’importe où dans cet espace restreint. Cette zone géo-limitée s’étend au fil du temps. Preuve que ça fonctionne, Cruise commence à s’étendre en dehors de San Francisco et vient de lancer des opérations à Phoenix (Arizona) et Austin (Texas).

Zoox est une entreprise de véhicules autonomes qui a été fondée en 2014 et rachetée par Amazon en 2020. Elle développe des véhicules spécialement conçus pour un service de robot taxi, dotés de quatre places assises et capables de circuler dans les deux sens à une vitesse maximale de 120 km/h. Les véhicules sont équipés d’un système embarqué avec une vision à 270° grâce aux radars, Lidars et caméras intégrés. La voiture Zoox présente la particularité d’être complètement symétrique de l’avant à l’arrière, ce qui lui permet d’emmener des passagers dans les deux sens sans avoir besoin d’un siège conducteur. En février 2023, Zoox a transporté des passagers dans son véhicule entièrement autonome sur la voie publique pour la première fois.

Uber travaille depuis de nombreuses années (en fait peu de temps après sa création en 2008) sur le sujet de la voiture autonome, quand son co-fondateur, Travis Kalanik, avait compris très vite les profits potentiels que pouvaient représenter des armées de voitures arpentant les villes du monde sans avoir à payer des chauffeurs et devoir faire face aux potentiels conflits sociaux que ne manquerait pas de générer cette économie de la précarité. L’entreprise de VTC Uber progresse vers son objectif d’introduire des véhicules autonomes prévu à l’origine à la fin de 2022. Après une période de gestation et de tests de plusieurs années, le service est actuellement disponible pendant la journée et nécessite la présence d’un chauffeur pour des raisons de sécurité. Cependant, les portes s’ouvrent automatiquement sans l’aide du conducteur mais Uber prévoit de déployer son service de véhicules autonomes en 2023 sans conducteur. L’entreprise a conclu un partenariat avec Motional pour équiper ses taxis autonomes de leur technologie au cours des 10 prochaines années, en commençant par une version modifiée et aménagée de la Hyundai Ioniq 5.

Quant à Waymo, la filiale d’Alphabet (Google) qu’on ne présente plus, elle a lancé son service de robotaxis dans les rues de San Francisc. Le service a d’abord commencé sous forme d’essai en 2017. Début 2020, l’entreprise a décidé de ne plus avoir de conducteurs de sécurité derrière le volant ni d’opérateurs à distance avant le déploiement grand public. Waymo exploite actuellement la Chrysler Pacifica et la Jaguar I-Pace qui sont équipées de capteurs et du système de conduite autonome Waymo Driver. En novembre 2022, Waymo a dévoilé un véhicule autonome fabriqué en partenariat avec Zeekr, marque chinoise détenue par Geely. La voiture est spécialement conçue pour la conduite autonome et pensée pour le transport en tant que service. Fin 2022, l’entreprise a étendu son service en dehors de San Francisco avec une ouverture à l’aéroport de Phoenix.

Comme on peut le voir, pour toutes ces entreprises (et d’autres, moins connues), la conduite autonome est déjà une réalité validée par les autorités et opérationnelle, même si elle avance à pas très comptés, et prudents.

Et Tesla dans tout ça ?

Elon Musk avait fait de nombreuses annonces dans ce sens, celui des robotaxis, dès 2019, se risquant même à promettre les premières Model 3 automatiques dès fin 2020. La promesse allait assez loin puisque, au-delà de la technologie encore assez improbable, Musk avançait un argument économique consistant à expliquer que la Model 3 allait prendre une valeur inestimable du fait que chaque propriétaire allait pouvoir la transformer en robotaxi et en tirer des revenus à la location. Nous sommes en 2023 et bien sûr aucun Robotaxi Tesla ne roule nulle part, mais est-ce vraiment une surprise ? Un jour peut-être…

Nous ne reviendrons pas non plus sur les nombreux déboires qu’a connus la marque autour de son FSD (Full Self Driving), parfois sous la forme d’accidents dramatiques, même si la médiatisation parfois exagérée, que certains qualifieront même d’injuste, de ces derniers n’a pas servi son image en ce domaine malgré une amélioration continue, et que Tesla n’est pas la seule à avoir connu des ratés dans les premières longueurs du déploiement de son dispositif.

Concernant justement la capacité de conduite autonome avancée (FSD), celle-ci est toujours en version bêta[1]. Un programme FSD Beta qui a attiré 285 000 participants – un peu chanceux – en Amérique du Nord[, mais qui est inexistant de ce côté-ci de l’Atlantique. Une mise à jour prévue début 2023 (ou peut-être déjà en cours de déploiement) réserve une petite surprise bienvenue aux clients, la possibilité de désactiver l’obligation de reprendre le volant toutes les 15 secondes, ainsi que les alarmes liées à cette fonction. Une nouveauté rendue possible suite à l’activation de la caméra intérieure logée dans le pied de rétroviseur des Tesla Model 3 et Y, et des S et X de dernière génération, qui permet de surveiller l’état de vigilance du conducteur. C’est en tout cas ce qu’annonçait Elon Musk… dans un tweet peut-être encore une fois un peu précipité.

Le déploiement tant attendu du FSD dernière version (V11) traine encore en longueur, ce qui met par conséquent Tesla en position non plus de leader mais de challenger sur la conduite autonome, tant les autres marques ont progressé rapidement sur le sujet, banalisant de fait la fonctionnalité, et rendant la conduite autonome de niveau 2 courante. Voire même plus conviviale et moins intrusive que celle de Tesla, si ce n’est plus intelligente dans certaines situations. Bien sûr, Tesla avait de l’avance, et n’a pas dit son dernier mot en continuant à accumuler un corpus de données monstrueux et probablement unique au monde avec son parc de voitures connectées en circulation depuis une dizaine d’années, qui remontent des téraoctets de bonnes informations bien frâiches. Or on sait que l’intelligence artificielle est essentiellement fondée sur la donnée. En sortant la version officielle et définitive de la version 11 de son logiciel, qui fusionnera FSD et Autopilot, la marque américaine pourrait frapper un grand coup et remettre tout le monde d’accord en reprenant l’avance qu’elle semble avoir perdue.

A condition qu’elle le sorte…

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