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Future norme antipollution automobile Euro 7 : pas si sévère

future norme antipollution automobile euro 7 : pas si sévère

Norme de pollution Euro 7

Le mystère a longtemps plané autour de la norme de pollution Euro 7, appliquée aux émissions des véhicules thermiques. Certains craignaient qu’elle ne tue les moteurs essence et diesel avant 2035, elle ne fait qu’harmoniser les critères pour les deux types de motorisations. Nouveauté : elle prend en compte les émissions de particules des freins et la fiabilité des batteries des voitures électriques.

La mise en place a été laborieuse, mais le projet de la nouvelle norme antipollution appliquée aux véhicules neufs a enfin été présentée par la Commission européenne ce jeudi 10 novembre. Cette norme Euro 7 a été retardée plusieurs fois et le plus grand flou régnait autour de ses seuils. Certains constructeurs craignaient qu’elle ne soit trop sévère, au point de tuer les moteurs thermiques, essence et diesel, avant l’échéance fixée par l’Union Européenne à 2035. Il n’en sera rien : les seuils d’émissions polluantes proposés restent dans la lignée de la précédente norme. Un choix relativement sage, qui fait bondir certaines associations écologistes. “La proposition de la Commission européenne est tellement faible qu’elle pourrait avoir été écrite pas l’industrie automobile elle-même”, déclare Anna Krajinska, responsable des questions liées aux émissions de véhicules au sein de l’association Transport & Environment.

Pour le lobby auto Euro 7 ne s’imposait pas

L’ONG Transport & Environment n’a jamais caché son idéologie pro-véhicules électriques. Il est logique de la voir fustiger la proposition concernant la norme de pollution Euro 7. “Les profits des constructeurs sont donc préférés à la santé de millions d’Européens”, poursuit Anna Krajinska. Le Commissaire européen Thierry Breton, qui a porté la proposition, s’en défend. “Grâce à Euro 7, les émissions de NOx des véhicules légers seront 35% plus basses que si nous avions gardé Euro 6. Et pour les poids lourds, c’est une baisse de 56%.”, explique-t-il dans un blog. Par la voix de l’ACEA (Association des Constructeurs Européens Automobiles), les industriels estiment que la mise en place d’une norme Euro 7 ne s’imposait pas. “Malheureusement, le bénéfice environnemental de la proposition de la Commission européenne est très limité, alors qu’elle va fortement impacter les coût des voitures”, a déclaré Oliver Zipse, patron de BMW. Quant à Carlos Tavares, patron de Stellantis, il déclarait à nos confrères du Figaro lors du dernier Mondial de l’Automobile “La norme Euro 7 est inutile. Pourquoi utilisons-nous nos ressources pour une technologie qui va être interdite ?”

Limiter le surcoût pour l’automobiliste

Sur l’argument du coût, Thierry Breton estime que l’impact sera raisonnable, avec “un coût d’environ 100-150 € par voiture”. Car plus que de protéger les profits des constructeurs, comme le met en avant Transport & Environment, c’est le portefeuille du client qu’il faut ménager. Les prix des voitures ne cessent d’augmenter en cette période de pénurie de matières premières. Au point que l’automobile pourrait devenir un produit de luxe, inaccessible au commun des mortels. Pour preuve, la marque low-cost Dacia ne cesse de gonfler ses tarifs : la Sandero, voiture préférée des particuliers en Europe, a ainsi augmenté de 33 % en deux ans !

Thierry Breton et le “bon équilibre”

Le compromis entre coût et exigence ne semble pas satisfaire grand monde a première vue. “Certains vont reprocher à la Commission d’être trop ambitieuse ; d’autres de ne pas l’être assez. C’est bien la preuve que nous avons trouvé le bon équilibre.” rétorque Thierry Breton. Ce qui est clair, c’est que les seuils d’émissions de la norme Euro 7 sont très conservateurs. La principale différence par rapport à la norme Euro 6 concerne l’absence de différence entre motorisation essence et diesel. Mais les chiffres demeurent identiques, le plus sévère ayant été retenu pour chaque polluant : 60 mg/km pour les NOx, 4,5 mg (en masse) et 6 x 1011 (en nombre) pour les particules fines, 500 mg/km pour le monoxyde de carbone… Il n’y a pas de révolution !

future norme antipollution automobile euro 7 : pas si sévère

Seuils de la norme Euro 7 Crédit : Commission européenne

Ce qui est nouveau, ce sont les exigences en matière d’application. Désormais, ces seuils doivent être respectés dans des situations de conduite plus larges, qui ne se cantonnent plus au test en laboratoire. Les conditions de température atmosphérique sont étendues (de 0°C à 35°C jusqu’à une altitude de 700 m), et les seuils ne doivent pas être dépassés, même sur des petits trajets de 10 km. Il est possible de dépasser, mais avec une tolérance de 1,6, sur des températures comprises entre – 10°C et 0°C ou entre 35°C et 45°C. Tout est fait pour éviter un nouveau Dieselgate, où de nombreux constructeurs se sont retranchés derrière les conditions de tests très précises des normes pour passer entre les mailles du filet. Également, les voitures doivent être capables de respecter ces seuils sur 8 ans et 160.000 km, puis jusqu’à 10 ans et 200.000 km avec une tolérance.

Les voitures électriques également concernées

Deux nouveautés d’importance interviennent. Les critères d’émission ne se concentrent plus seulement sur les émissions à l’échappement. Car la norme Euro 7, et c’est une première mondiale, réglemente les émissions de particules en provenance des freins, à un maximum de 7 mg/km. Insuffisant selon Transport & Environment, puisque cela ne nécessite pas de monter des systèmes d’aspiration des particules.

Également, la proposition de la Commission européenne s’inquiète de la durabilité des voitures électriques et hybrides rechargeable, en fixant des seuils de fiabilité pour leurs batteries. Celles-ci ne doivent pas perdre plus de 80 % de capacité au bout de 5 ans et 100.000 km, ni plus de 70 % au bout de 8 ans et 160.000 km. Le but est d’éviter le remplacement de ces éléments, dont la fabrication a un impact environnemental important sur l’environnement. Voilà qui part d’une bonne intention, mais aura sans doute pour effet pervers de conduire de plus en plus de constructeurs à brider leurs batteries en sortie d’usine, pour débloquer de la capacité cachée si l’état de santé atteint un seuil critique.

La norme Euro 7 peut paraître décevante à certains points de vue. Mais elle a le bon goût de se refuser à tirer sur l’ambulance, à imposer de trop fortes contraintes sur les motorisations thermiques condamnées à l’horizon 2035. Elle met par contre sur la table de nouveaux enjeux, avec les émissions de particules de freins et la durabilité des voitures électriques. Si les critères de ces nouveaux sujets sont encore timides, cette proposition a le mérite d’attirer l’attention des industriels sur les futurs points qu’ils devront surveiller en priorité. Reste que cette norme n’est pour l’instant pas encore validée, et doit passer devant le Parlement européen et être discutée avec les Etats-membres.

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