- Une entreprise en difficulté depuis de nombreuses années
- Les salariés en grève depuis le 17 avril
- Stellantis et le gouvernement pointent du doigt la CGT
- Les équipementiers sont nombreux à réduire leurs effectifs
« Un syndicat minoritaire (la CGT, ndlr) a empêché la reprise du travail en exerçant des actions d’intimidation envers les salariés ayant voté la reprise du travail », accusait Stellantis dans un communiqué publié début mai.
[Article mis en ligne lundi 13 mai 2024 à 14h54 et mis à jour à 15h54] La décision est prise, et l’avenir de 280 employés est désormais incertain. Ce lundi, le tribunal de commerce de Bobigny a placé en liquidation judiciaire l’équipementier MA France, dernière usine automobile de Seine-Saint-Denis employant 280 personnes à Aulnay-sous-Bois et sous-traitant du géant de l’automobile Stellantis, selon une décision consultée par l’AFP.
Dans la foulée de cette annonce, plus d’une centaine d’employés de MA France ont convergé lundi après-midi devant le tribunal judiciaire de Bobigny pour demander au procureur de faire appel de la décision de la cessation d’activité, a constaté une journaliste de l’AFP. Un important dispositif policier bloquait l’accès au tribunal.
Une entreprise en difficulté depuis de nombreuses années
Pour rappel, l’entreprise, basée à Aulnay-sous-Bois, sur l’ancien site historique de PSA, fabrique des pièces essentielles de carrosserie et de châssis pour les petits utilitaires Peugeot ou Citroën, pour les SUV Opel, et aussi pour Renault. Déjà dans une passe difficile ces dernières années, les récentes difficultés du secteur automobile lui ont donné le coup de grâce.
Les équipementiers font en effet face à la hausse des coûts de l’énergie depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine il y a près de deux ans. Autres défis à surmonter : la transition vers la mobilité électrique – alors que le secteur a bâti son succès sur la voiture thermique. Enfin, la concurrence des entreprises asiatiques qui ont grimpé dans le classement mondial des fournisseurs.
Le 6 mai, lorsque l’entreprise a demandé son placement en liquidation judiciaire, le ministre de l’Industrie Roland Lescure avait demandé à Stellantis et Renault, les deux principaux clients de MA France, d’accompagner leurs salariés.
« Je m’attends à ce que face à cette situation difficile, l’entreprise, mais aussi les principaux donneurs d’ordre, puissent contribuer à l’accompagnement des salariés », avait-il souligné, en marge de la signature du contrat de filière automobile, à Bercy. Il faut que chacun des 280 salariés soient accompagnés à la fois concernant le « traitement social », mais aussi « l’accompagnement à la requalification ».
Les salariés en grève depuis le 17 avril
« Notre boîte a agi sans prendre en compte les vies humaines. Nous estimons que les salariés ont été floués. Nous ne voulons pas être les dindons de la farce, personne ne peut partir avec le minimum alors que nous nous sommes sacrifiés 20 ans pour l’entreprise », estimait le représentant syndical.
L’intersyndicale avait aussi indiqué début mai que les négociations avec la direction avaient cessé et que l’indemnité supralégale de 45.000 euros évoquée n’était plus sur la table.
Stellantis et le gouvernement pointent du doigt la CGT
Mais pour le client du groupe, Stellantis, ce sont les syndicats les responsables de cette situation. Cette mobilisation a mis à l’arrêt trois usines de Stellantis pendant plusieurs semaines.
CLN « a fait le constat que son site d’Aulnay n’était pas compétitif et a proposé des conditions extralégales qui ont été validées le 30 avril par un vote majoritaire des salariés et supportées par les deux syndicats majoritaires de l’entreprise MA France. Un syndicat minoritaire (la CGT, ndlr) a empêché la reprise du travail en exerçant des actions d’intimidation envers les salariés ayant voté la reprise du travail », déplorait alors Stellantis dans un communiqué publié début mai.
Roland Lescure avait également mis en cause directement « une organisation syndicale minoritaire » à MA France – soit la CGT – d’avoir « décidé, en arrêtant le travail, de précipiter les choses ».
Le sénateur PCF de Seine-Saint-Denis Fabien Gay assurait à l’inverse que c’est Stellantis « qui a une responsabilité sociale en délocalisant la production de ses pièces en Turquie ». « Il y a aussi un double discours du gouvernement en voulant relancer l’industrie avec l’électrique et en même temps de désindustrialiser notamment en Seine-Saint-Denis. Bientôt, on ne construira plus aucune voiture en France », alertait l’élu.
Les équipementiers sont nombreux à réduire leurs effectifs
Les suppressions de postes se succèdent dans le monde des équipementiers automobile. Forvia a annoncé le 19 février qu’il allait mettre en place un plan d’économies appelé « EU-Forward ». Celui-ci doit atteindre 500 millions d’euros et il pourrait réduire ses effectifs en Europe de 10.000 personnes d’ici 2028. Le groupe, qui rassemble Faurecia, ex-filiale de Peugeot-Citroën, et l’Allemand Hella, justifie cette réduction d’effectif par une volonté d’augmenter sa « compétitivité » dans un marché automobile atone.
Avant lui, son concurrent allemand, Continental, a annoncé, le 14 février, la suppression de 7.150 postes dans le monde, dont « environ 5.400 » dans son administration, et 1.750 dans sa branche recherche et développement. Cela représente plus de 3% de l’ensemble des effectifs du groupe. Une opération qui sera effective « au plus tard d’ici 2025 », a précisé celui-ci dans un communiqué. Elle est mise en place dans le cadre d’un plan d’économies visant à accroître sa compétitivité pour la transition vers la mobilité électrique.
En novembre dernier déjà, Continental avait prévenu qu’il supprimerait des milliers d’emplois dans sa division automobile au niveau mondial, dans le cadre d’un plan visant à économiser 400 millions d’euros (428,32 millions de dollars) par an à partir de 2025.
(Avec AFP)