Voici la nouvelle Ferrari. La Ferrari haut de gamme. La plus belle et la plus désirable, même si elle n’est pas la plus chère. Fidèle à la tradition, c’est une biplace, propulsion à moteur central avant. En ces temps d’électrification forcée, elle a la caractéristique rare d’avoir une propulsion 100 % mécanique, sans même un Stop & Start pour couper le moteur à l’arrêt aux feux rouges. Autre caractéristique rare, son moteur ne reçoit aucune suralimentation. Comme une Dacia Sandero de base, sauf qu’ici, le bouilleur est un extrêmement noble V12. Pour que tout le monde le sache, la voiture a été nommée 12Cilindri. Sans doute que 650 GT 12 ne faisait pas assez spécial ? Il faudra surveiller les hôtesses Ferrari sur les salons, peut-être que sur le même registre, on leur demandera de porter un badge indiquant leur tour de poitrine.
Mais au dehors de cette mécanique d’exception, il y a une énorme surprise dans le design. Parce que les Ferrari ont souvent marqué leur époque. La Berlinetta Boxer des années 1970, la Testarossa des années 1980, la 550 qui revenait aux moteurs avant dans les années 1990… Des autos entièrement nouvelles, qui ne devaient rien à aucun modèle antérieur. Renault peut se permettre de faire une nouvelle R5, mais les Ferrari étaient toujours totalement nouvelles, jusqu’à cette 12Cilindri dont le bandeau des phares reprend le design de la 365 GTB/4 de 1968 (souvent appelée Daytona). Le design est de plus inutilement complexe, avec un bandeau noir entre les phares, ensuite un cerclage en carbone sur les prises d’air du capot, et encore du noir, beaucoup de noir pour ceinturer bizarrement la petite lunette arrière. La Ferrari Roma, avec sa calandre peinte est infiniment plus sobre, et plus élégante à nos yeux. Cette Ferrari n’est pas signée Pininfarina, elle est le fruit des designers maison, et ceci explique peut-être cela.
Ou peut-être que cette Ferrari 12Cilindri n’a pas été conçue pour les vieux passionnés européens, mais plutôt pour les rappers de Miami, les dubaïotes oisifs et les nouveaux millionnaires chinois, ces gens qui aiment ce qui flashe, et qui sauront apprécier un toit en verre (partiellement), et des sièges massants ? Aucun doute que cette Ferrari a un moteur extraordinaire, et nous espérons avoir la joie de l’entendre prochainement, mais quand les anciennes Ferrari étaient conçus avec passion, et pour rouler le plus vite possible, on voit le fruit du marketing dans cette 12Cilindri.Laurent J. Masson