Seul modèle à faire sourire les passionnés d’automobile comme les anti-bagnoles depuis trois quarts de siècle, le cultissime Combi Volkswagen rencontre son nouveau descendant : l’ID.Buzz. Le dernier-né compte sur sa bouille très inspirée et sa propulsion électrique pour réitérer le miracle. Rencontre au sommet... de la coolitude !
- Le Volkswagen Combi, Transporter, Bulli, T1, Type 2…
- Le Volkswagen ID.Buzz
- Au volant du Combi de 1961
- Au volant de l’ID.Buzz 2022
- Trouver un VW Combi aujourd’hui
- Bilan du match Combi vs ID.Buzz
- Les fiches techniques comparés
Voir les photos
VW Combi, Transporter, T1, Type 2, Split, Bulli… Les appellations pullulent pour le plus connu de tous les vans. Son lointain descendant ID.Buzz conservera-t-il la même aura ?
Thomas Antoine
Nous sommes le 23 avril 1947 à Wolfsburg, en Allemagne, et un certain Ben Pon, importateur VW néerlandais visitant l’usine de la Coccinelle, voit passer un plattenwagen. Un quoi ? Une Coccinelle sans carrosserie, remplacée par un simple plateau, engin idéal pour convoyer les charges lourdes d’un bout à l’autre du site industriel. « Pratique » pense-t-il, en saisissant son bloc-notes pour croquer l’idée qui lui vient à l’esprit. Sur cette drôle de base, il conserve le même moteur tout à l’arrière, imagine un poste de conduite rejeté tout à l’avant et, entre les deux, un grand espace de chargement abrité par une carrosserie ovoïde. Le Combi était né, ou presque.
Media Image
Image
Entre 1950 et 1967, le Volkswagen T1 s'est écoulé à 1,8 million d'exemplaires. Et l'ID.Buzz ? Rendez-vous en… 2039 !
Thomas Antoine
Le premier exemplaire sort des chaînes en mars 1950 et le succès est immédiat. Dès 1956, le Combi quitte Wolfsburg (où la production est quatre fois inférieure à la demande !) pour l’usine d’Hanovre, sur un site dédié où sont encore assemblées les camionnettes Volkswagen. Sept générations et plus de 13 millions d’unités plus tard, le dernier ID.Buzz respecte cette tradition malgré sa plate-forme MEB dédiée aux modèles électriques, tous assemblés à Zwickau (ID.3, ID.4, ID.5). Et là n’est pas l’unique point commun entre nos deux acolytes, comme nous le verrons au fil de cette rencontre.
Le Volkswagen Combi, Transporter, Bulli, T1, Type 2…
À son lancement, le Volkswagen « T1 » (nom communément donné à cette première génération) s’appelait plus correctement Type… 2, puisqu’il s’agit du second modèle Volkswagen après la Type 1 ou la fameuse Coccinelle. Une précision sans grande importance : Combi pour les Français, Bulli pour les Allemands (bullig signifie joufflu chez nos voisins !), Kombi pour les Brésiliens (abréviation de l’allemand Kombinationenwagen), Split pour les initiés (en référence à son pare-brise séparé en deux), ses petits noms pullulent et confirment son statut à part, celui d’un quasi-membre de la famille.
D’abord vendu en deux versions – familiale à deux vitres latérales et banquettes centrales ou commerciale entièrement tôlée –, le Combi va rapidement se décliner : ambulance, camionnette de piste pour Lufthansa, bureau de poste mobile… Chaque profession loue sa charge utile de 750 kg et son volume de 4,6 m3, jusqu’aux policiers qui le transforment en parfaite voiture-radar (Volkswagen s’en amusera dans une pub : « Oui, c’est un choc » avec la photo du maudit équipement). Les particuliers, eux, admirent dès 1951 les versions Bus Samba à huit places avec pavillon en toile encerclé de lucarnes (les fameux « 23 fenêtres », vendus plus de 150 000 € aujourd’hui) ou, mieux, la déclinaison van aménagé par Westfalia que s’arrachent encore les hippies chics.
Media Image
Image
Notre exemplaire de 1961 est une ambulance réformée, désormais équipée de 8 places et disponible à la location.
Media Image
Image
Media Image
Image
Media Image
Notre exemplaire est né comme ambulance et, à ce titre, dispose du grand hayon à seuil abaissé inauguré dès 1951 pour faciliter le chargement des brancards. Cet équipement arrivera pour tous en 1955 afin de mieux seconder l’unique porte latérale à double battant. À cette date, les Combi eurent aussi droit à la casquette sur le pavillon pour faire entrer l’air dans l’habitacle. Ensuite ? Il fallut attendre 1956 pour voir apparaître le rétro droit, 1959 pour obtenir la synchronisation des rapports de boîte, 1961 pour disposer d’une jauge à essence (simple robinet de réserve auparavant) et 1963 pour bénéficier d’une « vraie » porte latérale coulissante. Autre époque ! Évidemment réformée, notre ambulance biton de 1961 balade aujourd’hui trois banquettes à trois places et fait le bonheur des vacanciers près de Biarritz, qui peuvent louer ce superbe exemplaire à la sympathique équipe de Campy Camper.
Le Volkswagen ID.Buzz
Servi par sa plate-forme dédiée à l’électrique (à moteur arrière et batterie sous plancher), l’ID.Buzz est paradoxalement la génération qui évoque le mieux son lointain aïeul : mufle droit permis par l’absence de moteur avant, plancher plat du pare-brise au hayon, et passage possible de la banquette aux sièges avant sans descendre de l’auto (aucun tunnel de transmission). Les teintes biton optionnelles et le vaste logo avant font le reste, à l’instar de la bouille joviale évoquée dans la publicité ci-dessous. D’après C3P0, le droïde le plus connu de la saga Star Wars, l’ID.Buzz sourit !
Difficile d’imaginer que ce facétieux camion partage ses dessous avec le SUV coupé ID.5. Et pourtant ! À peine 11 cm plus long (4,71 m, mais son empattement s’étire sur 22 cm de plus), l’ID.Buzz récupère sa machine arrière la plus puissante et sa batterie de capacité maximale : 204 ch et 77 kWh utiles. Il n’en faut pas moins pour propulser ce beau bébé, qui avoue parallèlement 2,4 t sur la bascule et culmine à 420 km d’autonomie en cycle mixte WLTP (533 km pour l’ID.5, ou plutôt 460 km sur notre parcours-test).
Media Image
Image
Commercialisé à l'automne 2022, l'ID.Buzz se contente d'une propulsion 100% électrique.
Thomas Antoine
Trop juste pour un grand voyageur ? Parlez-en à notre Combi d’époque, dont le généreux appétit (entre 12 et 15 l aux 100 km) et le réservoir de 40 l ne combinent pas tant d’autonomie. À ceci près que le papy se ravitaille en 3 minutes à la pompe, quand l’ID.Buzz réclame 7 h 30 de branchement sur borne accélérée 11 kW, plus de 40 heures sur prise domestique classique, ou doit trouver des bornes de charge rapide, souvent situées sur lénifiante autoroute, pour récupérer 80 % de sa charge en 30 minutes. Pas idéal pour les longs trajets, sur lesquels il faudra tout bêtement prendre son temps. Sans doute un hommage à son ancêtre… qui interdisait déjà d’être pressé.
Au volant du Combi de 1961
Si la vue d’un VW Combi fige indéniablement le sourire, celui-ci s’éteint doucement (ou redouble, c’est selon) à l’installation à bord. Tout en se hissant sur la fine banquette, on baisse bien la tête pour éviter les points de suture sur le pavillon, puis on débute un grand écart pour faire passer ses gambettes de part et d’autre de la colonne de direction. Nous voilà assis à l’aplomb du pare-brise, droits comme des i, face à un volant si plat qu’on pourrait y poser une planche pour faire un comptoir. Garçon, un demi !
Media Image
Image
Vous avez dit spartiate…
Media Image
Image
… ou convivial ? Quelle ambiance !
Contre toute attente, le décollage ne s’avère pas trop délicat car l’embrayage est progressif et l’accélérateur aussi (doux euphémisme, vu la nervosité relative de l’engin). La tige faisant office de commande de boîte apparaît plutôt précise à manipuler. En tout cas bien plus que la direction, qu’il convient de faire osciller d’un bon 1/8 de tour tous les dix mètres environ pour garder son cap en ligne droite. Et dire que l’aiguille du tachymètre central tremblote seulement en face du « 50 km/h » !
En étant patient, on atteint 80 km/h puis on se ravise à l’instant précis où il faut casser sa vitesse. Pédale de frein juste effleurée ou comprimée au plancher, peu importe : le Combi à quatre tambours ralentit plus qu’il ne freine. L’anticipation doit donc devenir le maître-mot au volant, même si l’on ne souhaitait pas particulièrement retarder nos freinages vu la vision, mi-rigolote, mi-effrayante, du bitume qui défile sous nos pieds de part et d’autre de la pédale de frein. Quant à la ceinture de sécurité, elle brille par son absence. Ses points d’ancrage n’arriveront qu’avec le millésime 1966…
Media Image
Image
Au volant du premier Combi, mieux vaut prendre son temps…
Media Image
Image
Tenue de cap et freinage ramènent 60 ans en arrière.
On avance ainsi doucement, en conservant des distances de poids lourd sur voie rapide. Au sommet des côtes, lesdits poids lourds frôlent la carlingue, tous phares allumés, pour éviter notre Bulli s’égosillant à 37 km/h en deuxième dans un joli nuage de fumée bleue. Qui eût l’idée saugrenue d’emprunter l’autoroute ? Le royaume du Combi se limite donc à la route, si possible petite, prions-le déserte, où chaque temps de trajet annoncé par Google Maps devra être multiplié par deux, voire trois. Nous chevauchons pourtant une puissante version de Combi, à monstrueux 1.5 l de 44 ch, et ne roulons qu’à deux passagers. Quid du résultat avec le 1.1 25 ch d’origine, huit gaillards à bord et leurs bagages ? Sacré Bulli.
Au volant de l’ID.Buzz 2022
Malgré son museau busqué et sa planche de bord étroite pour une voiture moderne, le Volkswagen ID.Buzz n’a vraiment rien à voir avec son aïeul côté intérieur. Moquettes et chaleureux tissus se disputent le moindre centimètre carré d’habitacle, chaque passager dispose de sa prise USB et les commandes, plutôt rares, se concentrent en deux écrans rivalisant de brillance. La propulsion électrique, elle, sied bien à cette ambiance aussi zen que futuriste.
Media Image
Image
Bien plus reculé dans l'habitacle, le conducteur de l'ID.Buzz reste dépaysé : plancher plat, pare-brise à l'aplomb du museau.
Media Image
Image
S'il s'étend sur 4,71 m de long, ce gros cube à roulettes reste maniable grâce à un rayon de braquage riquiqui.
En ID.Buzz, point de relances tonitruantes mais un couple de 310 Nm disponible immédiatement. Idéal pour s’insérer facilement dans la circulation et surprendre les automobilistes, plus occupés à scruter sa robe orange que le feu passé au vert. Les flancs droits rendent le gabarit assez facile à cerner (sauf à l’avant : où s’arrête le nez ?), et l’excellent diamètre de braquage fait presque oublier les 4,71 m de long quand il s’agit de faire demi-tour, après le pique-nique, au bout de ce chemin bucolique.
Surtout, on n’appréhende plus les voies rapides. Elles font briller l’insonorisation efficace, les relances suffisantes et le confort des sièges, qui compensent une suspension forcément raide pour bien freiner les mouvements de caisse. Même l’autoroute est envisageable et ne crée pas de turbulences aérodynamiques. Du moins à l’oreille, car à 130 km/h ce haut gaillard doit forer son trou d’air et puiser dans ses ressources. La consommation instantanée en témoigne : près de 40 kWh aux 100 km sirotés à cette allure. Soit moins de 200 km d’autonomie avec une batterie abreuvée à 100 %.
Media Image
Image
Beaucoup d'espace sur cette banquette coulissante et inclinable. Les sièges individuels arriveront en version à six ou sept places, commercialisée plus tard.
Media Image
Image
Le plancher de coffre surélevé autorise une aire plane de chargement quand les dossiers sont repliés. Dessous, il y a de quoi loger les câbles de recharge.
Une nouvelle fois, mieux vaut prendre son temps, multiplier les pauses, voire filer le volant aux passagers pour aussi profiter des places arrière. Malgré l’espace très généreux permis par la banquette coulissante en deux parties, point de sièges individuels ici, ni d’assises en troisième rangée. Tous viendront sur une version encore allongée prévue en 2023. Quant à la déclinaison van aménagé, ce sera plutôt pour 2025. Ne râlez pas : il a bien fallu treize ans au Combi pour proposer une bête porte latérale coulissante.
Trouver un VW Combi aujourd’hui
Écoulé à 1,8 million d’exemplaires entre 1950 et 1967 (et produit aussi au Brésil à partir de 1957), le Volkswagen « T1 » a connu un nombre incalculable de versions. Difficile dès lors de communiquer une cote précise, dont la moyenne a beaucoup augmenté ces dernières années : environ 25 000 € jusqu’en 2018, plutôt 50 000 € aujourd’hui ! Soit pratiquement le prix d’un ID.Buzz neuf fin 2022, commercialisé à 56 990 € avant bonus.
Media Image
Image
Nos deux acolytes s'achètent quasiment le même prix aujourd'hui.
Thomas Antoine
Pour l’anecdote, le record d’une vente aux enchères reste détenu par un Combi Deluxe Samba « 23 fenêtres » tiré d’une série américaine, adjugé plus de 300 000 $ en 2017. Les déclinaisons Westfalia peuvent elles aussi affoler les compteurs selon leurs nombreux aménagements, qui vont de la simple camping-box de 1953 aux formules suivantes avec kitchenette, couchettes, voire hamac en travers pour coucher un enfant, sans oublier les différents toits relevables (ouverture latérale en accordéon, champignon à pourtour toilé…). Tout un programme !
Bilan du match Combi vs ID.Buzz
Fabriqué en 1961, onze ans après le lancement du premier Combi, notre exemplaire d’essai bénéficiait déjà de multiples améliorations techniques (puissance moteur, freinage, trains roulants, boîte de vitesses…). Malgré tout ? L’engin reste difficilement envisageable pour des voyages en famille étant donné ses performances apathiques, sa tenue de cap hasardeuse et son freinage tout théorique. À peine plus cher à l’achat vu la cote ascendante de son aïeul, le Volkswagen ID.Buzz est bien plus indiqué pour cet usage, en dépit d’une propulsion électrique qui impose de bien organiser ses points d’étape. Reste un détail : stationnés côte-à-côte, ces deux cubes ne génèrent toujours pas le même engouement des passants. Qui n’ont toujours d’yeux que pour le bleu et blanc… A revérifier dans 75 ans !
Media Image
Image
Contrairement aux apparences, le Volkswagen T1 est 66 cm plus court que l'ID.Buzz !
Thomas Antoine
Les fiches techniques comparés
| Volkswagen T1 (1950 à 1967) | Volkswagen ID.Buzz 2022 | |
| Longueur | 4,10 m | 4,71 m |
| Largeur | 1,70 m | 1,99 m |
| Hauteur | 1,90 m | 1,93 m |
| Empattement | 2,40 m | 2,99 m |
| Poids à vide | 1 070 kg | 2 407 kg |
| Capacité du réservoir | environ 40 l | – |
| Diamètre de braquage | environ 11,9 m | 11,1 m |
| Moteur | 4 cylindres à plat refroidi par air | électrique synchrone à aimant permanent |
| Cylindrée | 1 131, 1 192 ou 1 493 cm3 | – |
| Puissances | 25 à 44 ch | 204 ch |
| Boîte | mécanique, 4 rapports | réducteur, 1 rapport |
| Vitesse maxi | de 75 à 105 km/h | 145 km/h |
| Autonomie électrique WLTP | – | 419 km |
À lire aussi Un rare Combi camping-car à vendre
Encore un peu d’histoire…
Voici le fameux plattenwagen, évoqué en début d'article, qui a inspiré Ben Pon en 1947 pour son croquis du Transporter ci-après… Volkswagen Aktiengesellschaft
Ici le croquis en question, dans le bloc-notes personnel de Ben Pon. Poste de conduite avant, moteur arrière, cabine ovoïde, tout est là ! Pon
Mais rendons à César ce qui lui appartient : comme l'attestent ces extraits de brevets, Ferdinand Porsche eût, dès 1940, l'idée d'une cabine avancée sur base de Coccinelle dont il était l'inventeur. Porsche Aktiengesellschaft
Qui aurait pu anticiper une telle suite ? Quelle histoire… Thomas Antoine
Tags
