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COMMENTAIRE. Chaussée glissante pour l’automobile

commentaire. chaussée glissante pour l’automobile

Une borne de recharge sur l’aire de repos de la Mayenne, au bord de l’A81, dans la commune de Bonchamp-lès-Laval, au nord de Laval.

Alors que le Mondial de l’auto ouvrira bientôt ses portes à Paris, l’électrification du marché automobile européen patine. Les constructeurs s’exposent à des amendes, faute de réaliser les objectifs de baisse des émissions de CO2 décidées par l’Europe.

Paris, capitale mondiale de l’automobile, du 14 au 20 octobre. « Une fête », selon le directeur du Salon. Plaisir des yeux. Comme à chaque édition, les visiteurs viendront admirer les nouveautés qu’ils ne pourront jamais s’offrir. Ou scruter sous tous les angles le véhicule déjà programmé à l’achat.

Pour les constructeurs, en revanche, la route est loin d’être dégagée. Ils voient arriver à pleine vitesse dans leur rétroviseur la concurrence chinoise. Deux années exceptionnelles de résultats financiers avaient pu entretenir l’illusion. L’atterrissage est brutal. Et le niveau global des ventes en 2024 devrait être inférieur à celui obtenu en 2019.

Plus inquiétant encore, les ventes de voitures électriques patinent. Faute d’atteindre les objectifs de réduction de CO2 fixés par l’Europe, les constructeurs du Vieux Continent s’apprêtent à payer un montant record d’amendes à partir du 1er janvier.

Faire une pause ou accélérer ? La bataille se joue dans les coulisses du Parlement européen et de la Commission. Un bras de fer entre lobbies. D’un côté, les défenseurs de l’environnement et du climat ; de l’autre, les constructeurs.

À l’appel de l’ONG Transport & Environnement et de l’initiative EV du Climate Group, une cinquantaine d’entreprises viennent d’exhorter l’Europe à rester ferme sur ses ambitions climatiques. Regarder de plus près les signataires pose question, cependant. Volvo est sous le contrôle du groupe chinois Geely. Ayvens est le champion européen du leasing. Uber ne construit rien et se veut exemplaire sur l’électrification du parc automobile de ses chauffeurs indépendants. C’est bien et ce serait sans doute encore plus louable si cette plateforme accordait la même importance, sociale cette fois, à ses livreurs à vélo. Avec Uber Eats, beaucoup restent encore sur leur faim. Dans cette affaire, les conseillers ne sont pas toujours les payeurs.

Vague de licenciements

Par le biais de l’Acea (l’Association des constructeurs européens d’automobiles), ces derniers demandent de leur côté à l’Europe un sursis. L’Union européenne a opté pour des voitures neuves sans émissions à partir de 2035. « En 2030, les transports devraient représenter à eux seuls près de la moitié des émissions de gaz à effet de serre de l’Europe. Les voitures fonctionnant à l’essence [en] étant responsables de près de 40 % », répliquent les signataires de la pétition initiée par les défenseurs de l’environnement.

Difficile de contester l’urgence de s’attaquer à la réduction des émissions de CO2. On peut cependant regretter qu’une partie des objectifs fixés dans ce domaine ait sous-estimé l’ampleur des transformations à conduire.

Or c’est la base même du socle industriel européen qui est aujourd’hui menacé. On le voit avec la vague de licenciements annoncés chez les sous-traitants automobiles européens. Ou encore les difficultés de Northvolt, le fabricant suédois de batteries. Il y va de l’équilibre des territoires. Dans l’Ouest, à La Suze-sur-Sarthe, 4 500 habitants, au site de Valeo, 250 emplois sont ainsi en sursis. En France, la moitié des effectifs, près de 60 000 aujourd’hui, pourraient être rayés de la carte d’ici à cinq ans, estime la FIEV (Fédération des industries des équipements pour véhicules).

L’Europe a pris conscience de la menace en durcissant les règles sur les importations de véhicules chinois. Mais ce n’est pour l’instant qu’un pis-aller qui relance la guerre commerciale entre grands blocs. La réponse serait une véritable stratégie industrielle européenne, comme le souligne le rapport Draghi.

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