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Bugatti Chiron

Hypercar

Essai Bugatti Chiron Super Sport. Au volant de l'hypercar de 1600 ch !

1 600 ch, 1 600 Nm de couple, 3 840 000 euros avant malus et hors options : une brève fiche technique qu'il vaut mieux oublier au moment d'essayer la dernière Bugatti Chiron Super Sport sur route ouverte. Mais, une fois au volant, nous avons vite pensé à autre chose...

Voiture à l’essai : Bugatti Chiron Super Sport

  • Moteur Essence | Puissance : 1600 ch
  • Lancement : avril 2022

À partir de
3 840 000 €

40 000 € de malus

C’est l’histoire d’une voiture qui devait être la meilleure au monde. L’histoire d’une voiture dont personne n’aurait « besoin ». L’histoire d’une voiture qui saurait donc faire tout ça à la fois : dépasser les 1 000 ch ; rouler plus vite qu’un prototype des 24H du Mans ; accélérer plus fort qu’une Ferrari de 0 à 100 km/h. Mais aussi savoir aller à l’opéra, dès lors en centre-ville et avec une robe du soir. Un cahier des charges digne du génial fondateur Ettore Bugatti, dépoussiéré début 2000 par un certain Ferdinand Piëch, patron du géant Volkswagen fraîchement acquéreur de la marque. En 2005, après plus de trente prototypes et des milliards d’euros consumés en ingénierie, la Bugatti Veyron allait naître, concilier l’inconciliable et, bien que personne n’en ait « besoin », connaître un succès suffisant pour accoucher d’une descendante : la Bugatti Chiron.

Lancée en 2016, la Chiron n’avait qu’à repousser les curseurs de la Veyron. Porter son W16 8.0 quadri-turbo de 1 001 à 1 500 ch. Rehausser sa vitesse de pointe de 407 à 420 km/h. Bonifier à nouveau son confort. Et dérouler des séries spéciales plus effrayantes encore : 1 600 ch pour notre Chiron Super Sport, à la poupe étirée de 25 cm pour asseoir l’auto et repousser le limiteur de vitesse de 420 à 440 km/h. Son prototype débridé a même atteint 490 km/h (!) aux mains du pilote Andy Wallace, aujourd’hui copilote de luxe pour notre premier essai de ce pinacle automobile.

essai bugatti chiron super sport. au volant de l'hypercar de 1600 ch !

Le pilote officiel, Andy Wallace, nous a accompagnés pour cet essai très spécial.

À l’idée d’exploiter 1 600 ch sur route ouverte, je ne me précipite pas au volant et laisse volontiers débuter Andy, habitué à embarquer clients, prospects et journalistes depuis le lancement de la Veyron. 1 600 ch ? Une valeur à peine croyable… et à peine soutenable depuis la place passager, quand mon chauffeur accélère à fond la première fois. « D’après l’afficheur dédié, nous venons de convoquer 800 ch mais n’avons même pas dépassé 3 500 tr/min. Je crois que je ne m’y ferai jamais ! » lance, hilare, le triple vainqueur de 24H de Daytona (et des 24H du Mans en 1988). Entre deux relances à couper littéralement le souffle (je ne suis pas malade en voiture, mais là…), le monstre reprend « forme humaine », absorbe les bosses, escalade les dos-d’âne mieux qu’une Mercedes Classe A, égrène ses rapports sans le moindre à-coup. Pas certain de retrouver la même docilité sans son maître aux commandes et d’ailleurs, il est temps d’aller au front.

A bord de la Bugatti Chiron

L’installation dans une Chiron ne présente aucune difficulté particulière. Les longues et légères portes à ouverture classique facilitent l’accès. Les sièges et le volant s’ajustent au millimètre. La vision périphérique est étonnante grâce au pare-brise incurvé et aux montants très fins permis par la rigidité de la monocoque en carbone. Si l’auto n’avait pas omis d’écran au centre de la planche de bord, je m’imaginerais dans une Bentley. En plus maniable même, la Chiron sortant de son petit parking aussi facilement qu’une Clio. Sidérant.

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Ambiance épurée en Chiron, qui refuse tout écran tactile.

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Rare en supercar : l'habitacle ne manque pas d'espace.

Sur les deux afficheurs numériques encadrant le tachymètre (gradué jusqu’à 500 km/h, tout est normal), les rapports de boîte défilent, la température d’huile grimpe, celle des Michelin Pilot Sport Cup 2 aussi. « Quand les gommes atteignent 25°, tu peux accélérer à fond sans le moindre patinage, même en première », assure Andy. Pas le temps d’en douter. Au premier bout droit dégagé, je me force à comprimer la pédale de droite comme si j’avais dû me jeter dans le vide. D’ailleurs, la sensation suivante confine au saut à l’élastique (quand il se tend, évidemment). La poussée ne ressemble à rien de terrestre, pas même à celle d’une surpuissante voiture électrique, plus immédiate au décollage. En Chiron, le temps que les quatre turbos sortent de leur léthargie, un léger temps de réponse se fait sentir… et décuple finalement l’orage à venir.

“Un kilomètre toutes les 7 secondes”

Quand la foudre éclate, on ne fait rien d’autre que s’agripper au volant, passager d’une fusée qui n’allume même pas son voyant d’antipatinage, comme aimantée par le sol sans la moindre ruade ni oscillation de trajectoire. Trois secondes plus tard, le tachymètre affiche déjà 270 km/h et la poussée ne s’essouffle toujours pas. Au point d’imaginer repasser le même rapport à chaque pichenette sur la palette de droite. Une électrique ? Où ça ?

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2,4 s pour atteindre 100 km/h, 5,8 s pour atteindre 200 km/h, 12,1 s pour atteindre 300 km/h. D'autres questions ?

D’un claquement de paume sur sa cuisse droite (qui m’extrait d’une grisante euphorie), Andy prévient qu’il est temps de taper dans les freins. La Chiron montre alors une nouvelle facette. Vous avez déjà eu l’impression, vous, de freiner toute la voiture du bout de vos orteils ? En Bugatti, oui. La sensation à la pédale apparaît si progressive, si efficace, si puissante, que le ralentissement semble vous aspirer vers le sol avant un second effet. « C’est l'aérofrein ! », sourit Andy. Braqué au maximum dans le rétro central (soit 39°), l’aileron mobile ajoute 0,6 G à la décélération, qui culmine à 2 G au total. Une valeur d’auto de course dans cet écrin parfaitement insonorisé… à moins d’avoir descendu le double vitrage pour écouter les soupapes de décharge à la décélération. Le puissant souffle rappelle alors un pneu qui éclate. Cet engin chamboule vraiment tous les sens.

Si le poids annoncé apparaît impossible à croire (à l’accélération comme au freinage !), les rares courbes ne le rendent pas plus crédible : direction légère mais précise, montée en effort progressive à mesure que l’appui s’intensifie, mouvements de caisse verrouillés avec maestria. Et du grip, du vrai, venant du pneu et pas d’une direction artificiellement directe pour accroître la sensation d’agilité. Dernière entrée d’autoroute en légère courbe, Andy autorise une ultime accélération maximale, l'auto se tasse sur l’arrière mais ne perd pas davantage sa motricité, esquissant juste un début de déhanchement tout en tractant comme une sourde. La déconnexion de l’antidérapage ne sera pas pour cette fois, pas plus que l’atteinte des 440 km/h… sans doute réalisable sur un anneau de vitesse, pas sur autoroute allemande non limitée. Confirmation auprès de notre passager, qui a expérimenté cette téléportation des dizaines de fois.

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Pour décaler la bride de 380 à 440 km/h, il faut activer la seconde clef, ne plus toucher aux freins… et prendre l'affaire au sérieux.

« Jusqu’à 380 km/h, tout va bien », assure Andy dans un flegme rieur. Le mode Autobahn (qui s’enclenche manuellement au volant ou automatiquement après 180 km/h) abaisse l’avant de 20 mm, rehausse l’arrière de 1 mm, braque l’aileron de 15° à 10° et réduit l’assistance de direction pour une parfaite stabilité. Pour atteindre les 440 km/h, il faut activer une seconde clef spéciale. Si tous les systèmes sont à température et ne révèlent pas de défauts, l’auto s’abaisse encore de 15 mm à l’avant et de 27 mm à l’arrière, alors que l’aileron disparaît dans la longue poupe pour réduire le traînée au maximum.

« Passé ce cap, c’est différent » tempère Andy, dont le record de vitesse avec une Chiron 300+ de présérie ne semble pas rester son meilleur souvenir automobile. Il poursuit : « À 490 km/h, vous parcourez un kilomètre toutes les 7 secondes. Le cerveau n’est pas habitué à cela. Tout va tellement vite… La moindre bosse, le moindre mouvement de direction, tout est décuplé : 300 kg de portance aérodynamique cherchent à faire décoller le nez de l’auto. » À 420 km/h, déjà, il faut s’imaginer que la roue tourne plus de 50 fois par seconde, que le bouchon de valve de 2,5 g passe à plus de 7 kg, que la valve elle-même passe de 18,3 g à 55 kg et que la bande de roulement, renforcée à l’extrême pour ne pas se déchirer sous l’effet de la force centrifuge, exige le remplacement des pneus après 20 minutes à vitesse maximale. Cela est d’ailleurs impossible en une seule fois, puisque la Chiron sirote les 100 litres de son réservoir en moins de 7 minutes à cette allure. On parie que dans 100 ans on en parlera encore ? Quelle machine.

Bilan de l'essai Bugatti Chiron Super Sport

Plus encore que la poussée herculéenne, difficilement transcriptible, c’est la manière dont cette Bugatti se conduit comme une Clio qui interpelle. Comment une auto peut-elle rester si silencieuse, si confortable, si facile, après avoir accéléré comme une Formule 1 puis dépassé sa vitesse de pointe ? Les ingénieurs le savent. Pas nous, juste convaincus que cette Chiron ne ressemble à rien d’autre. Ni à une Lamborghini Aventador, fatigante, ni à une Ferrari SF90, bien plus lente. « Si c’est comparable, ce n’est plus une Bugatti » disait le fondateur Ettore, au début du XXe siècle. Comme ces mots jaillissent de vérité désormais.

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Pour faire plus ample connaissance avec la Bugatti Chiron Super Sport, cliquez sur l'image et suivez notre diaporama légendé.

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  •  Non, rien de rien…

Fiche technique Bugatti Chiron Super Sport

Dimensions et poids
Longueur 4,77 m
Largeur rétros déployés 2,18 m
Hauteur 1,21 m
Empattement 2,71 m
Volume du coffre 44 l (à l'avant)
Capacité du réservoir 100 l
Pneus sur modèle d'essai 285/30 R20 à l'AV, 355/25 R21 à l'AR
Poids à vide DIN 1 995 kg
Puissance et performance
Type de moteur essence 16 cylindres en W, quatre turbos
Cylindrée 7 993 cm3
Puissance 1 600 ch de 7 050 à 7 100 tr/min
Couple 1 600 Nm de 2 250 à 7 000 tr/min
Transmission intégrale permanente
Boîte de vitesses robotisée double embrayage 7 rapports
0 à 100 km/h 2,4 s
0 à 200 km/h 5,8 s
0 à 300 km/h 12,1 s
0 à 400 km/h 28,6 s
Vitesse maximale 440 km/h (limitée électroniquement)
Consommation – CO2 – Malus
Mixte WLTP 21,5 l/100 km
Rejets de CO2 487 g/km
Malus CO2 – 2022 40 000 €
Malus au poids – 2022 aucun*
Puissance fiscale > 214 CV
Garantie 4 ans ou 50 000 km
Pays de production France

* Somme des malus au poids et CO2 plafonnés à 40 000 € en 2022.

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