Route de nuit

Raël : de l'automobile aux extraterrestres

Avant d'être le gourou de la secte qui porte son nom, il a été tour à tour pilote, journaliste automobile et chanteur. Retour sur la vie d'avant, quand Raël s'appelait Claude Vorilhon et qu'il n'était pas encore "l'ambassadeur des extraterrestres sur terre" auquel Netflix consacre un documentaire.

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Rael court en 2001, le Trophée Lamborghini, sponsorisé par lui-même, ou plutôt par ses adeptes. Il partage sa voiture avec Jean-Claude Andruet.

Le journalisme automobile mène à tout, à condition d’en sortir. Tel pourrait être la devise de Claude Vorilhon, mieux connu sous le pseudonyme de Raël et à qui Netflix consacre une  mini-série documentaire. Car l’Auvergnat, né à Vichy en 1946, a testé des autos, lancé un magazine spécialisé et tâté de la course avant de croiser la route des extraterrestres qui allaient le rendre riche et célèbre

L’automobile, il a toujours aimé ça. D’abord en navigateur, puis en pilote, il participe très jeune à plusieurs rallyes régionaux et à quelques courses de côtes qui fleurissaient dans ces années soixante auvergnates. Il parvient même à se distinguer de ses concurrents en finissant troisième du volant Winfield de 1966 à Magny-Cours, une bonne filière pour devenir pilote professionnel à l’époque. Mais il lui manque ce tout petit coup de pouce et, peut être ce petit supplément de talent qui fait les grandes carrières.

Claude Vorilhon, alias Claude Celler, alias Raël

Pas grave, le jeune homme a des ressources, et le goût de l’argent. Il tente tout d’abord de se lancer dans le show-business, en devenant « chanteur à texte » et en s’auto-décrétant (excusez du peu) héritier de Jacques Brel. Vorilhon a aussi du bagout et parvient à convaincre Lucien Morisse, le grand chaman de la chanson française de l’époque et découvreur, entre autres, de Dalida, Polnareff et Christophe. Pour faire carrière, Vorilhon change de nom et choisi celui de Claude Celler.

La pochette d'un 45 tours de Claude Vorilhon, pardon, de Claude Celler.

La pochette d’un 45 tours de Claude Vorilhon, pardon, de Claude Celler.

Mais quelques disques plus tard, c’est le drame. Morisse se suicide en 1970 et sa mort signe la fin de la carrière de Celler qui redevient Vorilhon. Que faire ? La course auto lui revient en mémoire. Alors il organise une tombola dont le premier prix est un volant et un contrat dans une importante écurie. C’est un succès. Les billets s’arrachent, mais le volant comme le team n’existent pas. Si l’affaire ressemble fort à une escroquerie, la justice n’y voit rien et n’est même pas saisie.

Vorilhon est en veine, et quelque temps après le jeu-concours, il se lance dans l’édition en créant le magazine Auto pop (la revue des pilotes). Il s’investit lui-même dans la rédaction et réalise notamment des essais de sportives qu’il emmène au circuit du Mas du clos, toujours en costume et en nœud papillon, ce qui désarçonne un brin les habitués de la piste.

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Une

Une “Une” d’Auto pop, la revue des pilotes.

L’affaire n’est pas florissante, mais le journal se vend gentiment à 25 000 exemplaires en moyenne, ce qui n’est pas extraordinaire à l’époque. Mais en 1973, patatras : le choc pétrolier passe par là. Le prix du carburant explose, et les courses automobiles s’arrêtent durant trois mois. Gênant pour un titre qui s’y consacre, et publie des essais de grosses cylindrées.

Les extraterrestres ont-ils eu vent de la passe difficile que traverse Vorilhon ? Toujours est-il que le 13 septembre 1973, en se promenant du côté du Puy de la Vache, dans cette Auvergne qu’il n’a toujours pas quitté, le patron de presse tombe nez à nez avec leur soucoupe volante. Ils lui expliquent alors que, même s’ils viennent de très loin, ce sont des chics types qui veulent aider l’humanité et qu’il sera leur ambassadeur sous le nom de Raël.

Une telle rencontre du troisième type constitue un choc, même pour les moins vulnérables. Pas pour Claude – Raël. Selon un journaliste automobile qui travaillait à ses côtés à l’époque, il a rejoint la rédaction ce jour-là, après sa ballade en affichant la même humeur qu’auparavant.

La course automobile ? “C’est à la demande des adeptes”.

La suite est plus connue et plus sinistre. Quelques mois plus tard, Auto-Pop s’arrête. Celui qui s’appelle désormais Raël publie son premier bouquin, Le livre qui dit la vérité, pas moins, et fonde son mouvement, considéré officiellement depuis 1995 comme une secte avec son lot d’emprise mentale et d’abjections supposées telles que ces esclaves sexuelles au service exclusif du gourou.

Ces accusations, largement commentées depuis des années, et reprises par le documentaire Netflix, n’ont pas empêché Raël de renouer avec le sport automobile, entre 1994 et 2001. Et sans même avoir à chercher des sponsors, puisque c’est « à la demande des adeptes » comme il l’expliquera, qu’il utilise leurs dons pour s’inscrire en Tourisme au Japon puis au Canada, puis en GT et même en Nascar aux États-Unis ou en Trophée Lamborghini en Europe.

De bien beaux voyages pour des résultats qui le sont moins. Il a néanmoins obtenu une 8e position en super tourisme lors de la manche de Montréal. Un coup de chance ? Certainement. Comme tous ceux qui lui ont permis depuis l’origine de faire cette drôle de carrière sans jamais avoir été réellement inquiété par la justice.

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