OĂč lâessai du Q5 Sportback, ma troisiĂšme Audi, scellera mon opinion sur la gamme.
Commençons cet article par une confession : jâai toujours eu du mal avec les Audi. Lâorigine de ce dĂ©samour ? Globalement nĂ©buleux. Certes, les possesseurs dâAudi ne mâinspirent, au mieux, quâune forme dâindiffĂ©rence mĂȘlĂ©e dâun soupçon de dĂ©dain et de jugement, mais cette rĂ©ponse ne me satisfaisait pas : pourquoi ces gens achĂštent des Audi ? Quâest-ce que ça fait, de rouler en Audi ? Mon cĂŽtĂ© âjournalisme totalâ mâa poussĂ© Ă passer du temps au volant de trois modĂšles : lâA4 restylĂ©e dâabord, suivi par lâe-tron Sportback et, enfin, ce Q5 Sportback. Et il est temps de conclure sur cette Ă©trange relation qui mâunit Ă la marque aux anneaux.
Bref rĂ©cap sur les deux prĂ©cĂ©dents essais : lâA4 mâavait laissĂ©, il faut bien en convenir, globalement froid. Factuellement une bonne bagnole, hein, mais je nâai pas trouvĂ© quoi que ce soit dâexcitant ou dâattachant. Tout le contraire, cependant, avec lâe-tron Sportback. La voiture est jolie, dynamique, confortable, trĂšs plaisante Ă conduire ; vraiment pas grand chose Ă ajouter. Je sentais cependant que mon histoire avec Audi ne devait pas sâarrĂȘter lĂ ; câest donc avec une vraie curiositĂ© que jâai rĂ©pondu prĂ©sent Ă lâinvitation de la marque Ă venir essayer leur dernier bĂ©bĂ©, la dĂ©clinaison Sportback de son Q5 Ă succĂšs.
PremiĂšre dĂ©couverte, donc, sur le parking de lâaĂ©roport dâAjaccio -lâoccasion pour moi de rĂ©Ă©voquer ce que jâai dĂ©jĂ dit un certain nombre de fois : les SUV coupĂ©s ne sont pas ma tasse de thĂ©. Deux seuls modĂšles Ă©chappent Ă cette rĂšgle, deux modĂšles qui (surprise !) ont quatre anneaux sur la calandre : le Q8 (quel charisme !!) et lâe-tron Sportback (quelle Ă©lĂ©gance !!). Le dĂ©rivĂ© coupĂ© du Q5 avait donc ses chancesâŠmais ne transforme pas lâessai, ou du moins pas Ă mon goĂ»t. Ceci dit, si vous aimez ce genre de carrosserie, vous ne devriez avoir aucun mal Ă craquer sur cette lunette arriĂšre trĂšs inclinĂ©e et ce pare-choc rĂ©haussĂ©. En dĂ©tail, ce Q5 Sportback reprend les mĂȘmes dimensions que son frĂšre ânormalâ (4 689 x 1 893 x 1 660) et reprend Ă son compte cette jolie ligne dâĂ©paule dĂ©jĂ vue sur lâĂ©lĂ©gante A5, par exemple. La calandre Singleframe affiche un traitĂ© diffĂ©rent, etâŠcâest globalement tout. Cela fait des annĂ©es quâAudi met minable la concurrence au niveau des optiques et enfonce encore le clou : on peut choisir Ă la commande le graphisme des feux arriĂšre OLED ! Ah si, une derniĂšre chose : Audi croit fort en son Q5 Sportback puisque la marque prĂ©voit un volume Ă 50/50 entre les deux carrosseries.
Et Ă lâintĂ©rieur ? RĂ©pondons de suite Ă la question qui fĂąche : non, le Q5 Sportback ne sacrifie pas lâhabitabilitĂ© Ă lâarriĂšre (enfin si, vous perdezâŠ2 mm de haut) et sâoffre mĂȘme le luxe de proposer de sĂ©rie une toujours trĂšs pratique banquette coulissante. Seul le coffre douille un peu avec 40 litres de moins, mĂȘme si les 510 litres proposĂ©s restent raisonnables. A noter cependant : les modĂšles hybrides font baisser la contenance de la soute Ă 455 litres et celle du rĂ©servoir Ă 53 litres, au lieu de 70⊠Il fallait bien mettre les batteries quelque part.
On retrouve donc la planche de bord entiĂšrement reprise du Q5 restylĂ©, soit une formule amĂ©liorĂ©e du modĂšle de 2017. 2017, câĂ©tait il y a quatre ans, et beaucoup de choses se sont passĂ©es depuis ; jây inclus les Ă©crans posĂ©s au sommet de la planche de bord. Depuis, quasiment tous les modĂšles (chez Audi y compris) ont des Ă©crans bien mieux intĂ©grĂ©s Ă lâensemble, profitant Ă lâharmonie Ă bord. Parce quâun Ă©cran posĂ© au milieu de rienâŠcâest pas trĂšs beau. Le Q5 Sportback propose donc une planche de bord quand mĂȘme assez datĂ©e, mais se rattrape avec ce qui se passe dans ces foutus Ă©crans. Car le MMI (= lâinterface multimĂ©dia de la marque pour que ma maman comprenne) est une nouvelle fois mise Ă jour et repose dĂ©sormais sur le âMIB 3âł encore plus rapide/moderne/intuitif/connectĂ© quâauparavant, et câest tout simplement remarquable. LâĂ©cran central de 10.1 pouces est dâune clartĂ© et dâune simplicitĂ© royale, tandis que le Virtual Cockpit de 12.3â reste, Ă mon goĂ»t, dâune beautĂ© et dâune ergonomie peu Ă©galĂ©es.
En termes de motorisations ? Cinq possibilitĂ©s : deux diesel (TDI 35 de 163 ch et TDI 40 de 204 ch), deux hybrides rechargeables essence (TFSI e 50 de 299 ch et TFSI e 55 de 367 ch) et une version S dotĂ©e du V6 TDI de 341 ch ; jâai eu ces deux derniers moteurs Ă lâessai, en commençant par lâhybride -hybride qui profite du restylage pour voir la capacitĂ© de sa batterie passer de 14.1 kWh Ă 17.9 kWh, permettant dâannoncer une autonomie Ă©lectrique comprise entre 56 et 61 km selon les versions et Ă©quipements sĂ©lectionnĂ©s.
Quâest-ce quâil vaut, ce Q5 Sportback hybride ? Je ne vais pas dire quâil est ennuyeux Ă conduire ; disons simplement quâil fait son taf et quâil le fait bien, sans extra -et câest sans nul doute ce que recherche avant tout un conducteur âlambdaâ. La conduite est souple, le chĂąssis rigoureux, les relances efficaces : nous avons entre les mains une voiture rassurante Ă conduire. Pas trĂšs fun, certes, mais rassurante -encore une fois, nâest-ce pas lĂ le principe mĂȘme dâune voiture agrĂ©able au quotidien ? Cette premiĂšre mise en bouche sera Ă©galement lâoccasion de faire le point avec lâhallucinante liste des aides Ă la conduite, liste qui peut inclure des fonctions assez Ă©tonnantes : lorsquâune destination est entrĂ©e dans le GPS, et ce mĂȘme si le rĂ©gulateur adaptatif est Ă©teint, la voiture freinera dâelle-mĂȘme Ă lâapproche, par exemple, dâun virage serrĂ© ou dâun rond-point. Ajoutons Ă ceci un freinage rĂ©gĂ©nĂ©ratif qui pourra sâintensifier ou diminuer lĂ aussi sans aucune demande du conducteur ; deux fonctions assez dĂ©stabilisantes et qui nâont pas tardĂ© Ă ĂȘtre dĂ©connectĂ©es. Nâoublions cependant pas de parler de la pĂ©dale dâaccĂ©lĂ©ration âintelligenteâ : lorsque vous roulez en Ă©lectrique, lâĂ©lectronique gĂ©nĂ©rera une sorte de point dur dans la course afin de signifier, si on franchit ce point, que le moteur thermique se mettra en route. LĂ , pour le coup, ce nâest pas intrusif et mĂȘme plutĂŽt utile. Mais gardons Ă lâesprit, pour les rĂ©fractaires, que tous ces Ă©quipements sont en option đ
Le deuxiĂšme jour, changement de monture et de philosophie, puisquâun SQ5 Sportback dans ce fabuleux âVert Districtâ sâoffre Ă nous. Petit rappel : le SQ5, câest avant tout un V6 diesel de 341 ch & 700 Nm de couple associĂ© Ă un compresseur Ă©lectrique et une micro-hybridation 48 V permettant Ă ce Q5 Sportback Ă©nervĂ© de passer de 0 Ă 100 km/h en 5.1 s ; et nâoublions pas le chĂąssis, avec la classique suspension quattro et le diffĂ©rentiel Sport (âŠĂ 1 660 âŹ). A conduire, câest royal : les relances sont remarquables, lâallonge sublime et le chĂąssis extrĂȘmement rigoureux. MĂȘme si on sent que ce SQ5 nâest pas spĂ©cialement taillĂ© pour les virolos corses, il y fait preuve dâun dynamisme presque inattendu. Seulement voilĂ : repenser Ă cette auto me met en colĂšre.
Quand on arrive devant ce Q5 Sportback aux hormones, on est sĂ©duit par le charisme de la bĂȘte : la voiture est bien posĂ©e sur ses appuis, elle en impose. On tourne autour, on dĂ©couvre les superbes jantes de 21âł et les quatre habituelles sorties dâĂ©chappement typiques des Audi âSâ. Et, lorsque le conducteur dĂ©marre, un beau bruit sourd et grave sâen Ă©chappe, des vocalises qui feraient penser Ă un bon V8 des familles -une belle bande-son qui se poursuit dans lâhabitacle. Seulement voilĂ :
La justification dâAudi face Ă cette aberration ? DâaprĂšs eux, la volontĂ© dâuniformiser le dessin des pare-chocs arriĂšre entre les thermiques et les e-tron a conduit Ă cacher les âvraiesâ sorties dâĂ©chappement ; seulement voilĂ , toutes les Audi âSâ ont quatre pots et les clients les exigeaient, ce qui a conduit aux Ă©quipes de design Ă ce compromis chelou âon garde lâĂ©chappement classique mais on met quand mĂȘme quatre fausses canules juste derriĂšre pour faire plaisir Ă la plĂšbeâ. Soit. Mais ce nâest pas le seul problĂšme que jâai avec le SQ5. Vous vous souvenez lorsque je vous parlais de lâagrĂ©able bande-son du moteur ? Elle sort dâun haut-parleur. UN HAUT-PARLEUR. Du coup, lorsquâon fait une belle accĂ©lĂ©ration fenĂȘtre ouverte, on entend le âffsssshhhhhhâ pas trĂšs excitant typique des moteurs turbo venant de lâavant et un grognement beaucoup plus sourd Ă lâarriĂšre et câest, de mon point de vue, dâun mauvais goĂ»t assez spectaculaire. Et ça ne sâarrĂȘte pas lĂ : si vous rĂ©alisez ladite accĂ©lĂ©ration fenĂȘtre fermĂ©e, le bruit mĂ©canique ambiant proviendra, lui aussi, des haut-parleurs. Alors, oui, câest trĂšs bien fait et hyper rĂ©aliste (on est Ă des annĂ©es lumiĂšre de lâatrocitĂ© des premiĂšres Peugeot 308 GT) et oui, câest dĂ©sactivable, mais ça a tendance Ă me gaver sĂ©vĂšre et ça me laisse un arriĂšre-goĂ»t assez nĂ©gatif de la voiture -dâautant plus dommage puisque, je me rĂ©pĂšte, jâai vraiment bien aimĂ© conduire ce SQ5 Sportback.
De toute façon, lâavantage, câest quâon devrait avoir globalement peu de SQ5 Sportback sur nos routes : le prix de dĂ©part de 83 500 ⏠lâĂ©carte dĂ©jĂ du porte-monnaie dâun certain pourcentage de la population et le malus compris entre 26 247 ⏠et 30 000 ⏠achĂšvera tout espoir de succĂšs commercial en France. Les auspices sont meilleures pour les Q5 Sportback hybrides, avec un prix dâappel du 50 TFSI e de 299 ch fixĂ© Ă 66 400 ⏠(74 730 ⏠pour le 55 TFSI e de 367 ch) et, surtout, une absence de malus et une exonĂ©ration de la TVS -une aubaine pour les pros, donc. Audi ne se cache dâailleurs pas que ces versions hybrides reprĂ©senteront la majoritĂ© des ventes, et annonce quâelles compteront dans les â des ventes totales de Q5.
Concluons. Avoir essayĂ© le Q5 Sportback mâa permis de tester ma troisiĂšme Audi et dâaffiner lâorigine du peu dâintĂ©rĂȘt que je porte Ă la marque. Je pense mĂȘme avoir arrĂȘtĂ© mon jugement : Audi ne vend pas de voitures, elle vend du statut social. Les produits en eux-mĂȘmes sont loin dâĂȘtre mauvais et ont comme avantage principal dâĂȘtre suffisamment impersonnels et suffisamment valorisants pour convenir Ă la majoritĂ© de la population. Tout le monde y trouve son compte : ceux qui cherchent une relative discrĂ©tion choisiront les versions âcivilesâ, avec, soyons fous, une finition S-Line pour Ă©picer un peu le quotidien ; les amateurs de clinquant souhaitant en mettre plein la vue aux autres prĂ©fĂ©reront les artifices des S, voire RS pour les Ă©normes kĂ©kĂ©s puristes ultimes. Eh oui, ne nous voilons pas la face : avoir une Audi devant sa maison, ça claque. Et tant pis si les prises dâair sont obturĂ©es, que les grosses jantes vont dĂ©grader le confort, que les sorties dâĂ©chappement sont fausses et quâun haut-parleur vient Ă la rescousse pour susciter un dĂ©but de frisson mĂ©canique. Tant pis Ă©galement si on doit sâendetter pendant des plombes pour une voiture sous-Ă©quipĂ©e, pourvu quâon ait les chromes et les quatre anneaux. Un peu comme un iPhone, au final : aujourdâhui, un tĂ©lĂ©phone Ă 400 ⏠est capable de se sortir avec honneur de 98 % des tĂąches quotidiennes quâil rencontrera, mais on sâarrache des Apple deux fois plus chers parce que âça fait bienâ. Ce Q5 Sportback est peut-ĂȘtre une bonne bagnole, mais elle nâest pas pour moi.
Crédits photo : Jean-Baptiste Passieux
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