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Partage de la conduite dans les couples hétéros : les hommes tiennent toujours au volant

partage de la conduite dans les couples hétéros : les hommes tiennent toujours au volant

Ce sont majoritairement les hommes qui choisissent qui conduit (57 %) quand bien même les femmes affirment que la décision est partagée (50 %).

Il y a de ces jours, malgré les vagues féministes, les lois sur l’égalité entre les hommes et les femmes, les promesses de parité, les progrès certes très relatifs en matière de partage des tâches domestiques, où l’on se demande si l’on n’est pas resté au XXe siècle. On caricature à peine. Les premiers résultats d’une recherche sur le partage de la conduite au sein du couple, menée à l’université Gustave-Eiffel (de Champs-sur-Marne) et rendus publics mardi, alimentent ce constat : le vieil adage machiste «femme au volant, danger au tournant» n’a pas encore totalement quitté les esprits.

«Les résultats sont pires que ce qu’on attendait»

Explicitons : selon un sondage, préambule à un projet de thèse de doctorat de Seher Genç sur «les déterminants psychologiques du partage de la conduite dans les couples d’automobilistes ou de motards», les hommes, quels que soient les trajets – pour aller faire des courses, pour partir en vacances, etc. –, sont ceux qui conduisent le plus souvent au sein du couple. Seul un petit tiers des femmes affirme prendre toujours le volant. Pire, à nos yeux : ce sont majoritairement les hommes qui choisissent qui conduit (57 %) quand bien même les femmes affirment que la décision est partagée (50 %) ou qu’elles reconnaissent que c’est le fait de leur compagnon (33 %).

Conclusion : les hommes gardent largement mainmise dans l’habitacle sur le volant, comme si la conduite, la voiture était in fine le domaine réservé des mâles. «Il n’y avait aucune donnée au niveau français sur comment les couples se partagent le volant, souligne auprès de Libé Marie-Axelle Granié, directrice du laboratoire Mobilité durable, individu, société (Modis) et vice-présidente du comité des experts auprès du Conseil national de sécurité routière. Les résultats nous ont surpris car ils sont pires que ce qu’on attendait. On se doutait qu’il y aurait une forte proportion d’hommes au volant mais on ne pensait pas que ce serait aussi systématique sur tout type de trajet. Ça donne l’impression que quand une femme conduit, c’est que son conjoint la laisse faire.»

Les femmes beaucoup moins impliquées dans les accidents mortels

Ils portent aussi en eux-mêmes ce constat déjà pointé en 2016 par un rapport d’information sénatorial : les stéréotypes de genre afférents à la conduite auto depuis ses origines il y a un siècle vont bon train. D’ailleurs, toujours selon ces travaux préliminaires, les conductrices se déclarent souvent plus mal à l’aise quand elles prennent le volant au côté de leur conjoint et souvent plus gênées par les critiques sur leur conduite. Et ce alors même que les femmes sont, en moyenne, de bien meilleures conductrices. Selon les dernières données de l’Observatoire interministériel de la sécurité routière, à kilomètres parcourus équivalents, elles sont ainsi beaucoup moins impliquées dans des accidents mortels que les hommes, en sont trois fois moins victimes que les hommes, représentent moins de 20 % des permis de conduire invalidés et une minorité des délits de la route.

Bref, en fin de compte plus prudentes ou respectueuses du code la route. Et surtout beaucoup plus modeste en la matière que leurs époux ou concubins. Marie-Axelle Granié encore : «Avec cette étude, on souhaite voir l’effet des stéréotypes de sexe, et il y en a beaucoup, associés à la conduite, sur les comportements, comment ils affectent qui conduit et comment. Il s’agit en fait de regarder le partage du volant comme une tâche domestique comme les autres et regarder si cela se répercute aussi dans le choix du véhicule, la mécanique, etc.» La route vers la parité automobile est donc longue, étroite et sinueuse. Mais son horizon, si ces messieurs veulent bien s’installer sur le siège passager ou remettre à leur juste place leur sentiment de toute-puissance sur la route, est aussi un formidable levier pour réduire le nombre d’accidents et donc la mortalité routière. Cela demande juste un peu plus d’humilité de leur part. Et surtout de prendre conscience qu’ils ne sont pas dans leur bagnole les rois du monde.

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