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Aston Martin : "Nous ne sommes pas un top team"

Aston Martin a connu une véritable renaissance en 2023 en débarquant sur les podiums, mais malgré ce niveau de performance et les travaux entrepris à Silverstone, l’écurie affirme ne pas être un top team.

Avec six podiums grâce à Fernando Alonso, Aston Martin vit sa meilleure saison en Formule 1 depuis longtemps, très longtemps. Pour faire simple, la structure britannique n’avait pas été à pareille fête depuis la saison 1999 et les six podiums (dont deux victoires) qui avaient propulsé Heinz-Harald Frentzen dans la course au titre, sous l’ère .

Les investissements majeurs réalisés par le milliardaire Lawrence Stroll depuis le rachat d’une écurie Force India exsangue mi-2018 commencent à porter leurs fruits, alors que la construction d’un nouveau campus à Silverstone est en train d’être finalisée. Le directeur d’équipe Mike Krack a pour sa part pris les commandes de l’écurie début 2022 à la suite du départ d’Otmar Szafnauer à destination d’Alpine, mais tout ne s’est pas passé comme prévu : Aston Martin n’a marqué que 25 points lors des 16 premiers Grands Prix et occupait alors la neuvième place du championnat des constructeurs.

“Ça n’a pas super bien commencé en 2022”, concède Krack auprès de Motorsport.com. “Je crois qu’après trois courses, nous étions la seule équipe sans le moindre point, et nous avions une pression énorme. Je me rappelle très bien le vol retour de Melbourne, Tom [McCullough, directeur performance] et moi étions en train de nous dire : ‘Il faut qu’on tienne bon’. Car s’il y a un risque élevé de commencer à pointer les autres du doigt… Et nous sommes parvenus à ne pas le faire. Nous sommes parvenus à tirer les leçons qui devaient l’être.”

Un développement efficace a toutefois permis de renverser la situation en fin d’année : Lance Stroll a fini sixième à Singapour, tout comme Sebastian Vettel à Suzuka, et l’écurie a engrangé 30 points sur les six derniers rendez-vous – contre dix unités pour Alfa Romeo, Haas, AlphaTauri et Williams rassemblés. De quoi revenir au septième rang du classement général, à égalité de points avec la structure de Hinwil, sixième.

“Nous savions que nous n’allions pas faire de miracles en une saison, vu l’intensité [de la F1], vu le plafond budgétaire et toutes ces choses-là”, poursuit Krack. “Mais nous avons décidé d’essayer d’améliorer la voiture pas à pas avec nos moyens et de voir où cela nous menait. Puis à la fin de l’année, nous avions fait des progrès non négligeables. Il n’y avait pas suffisamment de points à marquer pour gagner beaucoup de terrain au championnat, alors nous avons fini là où nous avons fini. Mais nous étions relativement contents à la fin de l’année de voir comment nous nous en étions sortis.”

Sebastian Vettel, Aston Martin AMR22

Sebastian Vettel (Aston Martin) au Grand Prix du Japon 2022, où il a égalé son meilleur résultat de l’année avec la sixième place

Et ce n’était qu’un début. Aston Martin a notamment bénéficié de sa huitième place au championnat fin juin 2022, favorable pour l’allocation de temps en soufflerie selon la règle de handicap aéro pour la seconde moitié de l’année. “Différente à 95%” de sa devancière, l’AMR23 a vu l’écurie se propulser de la deuxième moitié de tableau, qu’elle occupait encore globalement en fin d’année, aux avant-postes en 2023… à la surprise générale.

“Nous n’avons pas dépassé les attentes”, clarifie Krack. “Semaine après semaine, les résultats en soufflerie ont montré que nous accomplissions les progrès souhaités. Nous étions confiants quant à nos progrès, mais nous ne savions pas où ils allaient nous placer, alors nous essayions d’être réalistes sur la progression nécessaire pour réaliser un pas en avant conséquent.”

“Les essais de Bahreïn nous ont ouvert les yeux ; nous étions au sommet du classement en permanence sans vraiment essayer d’y être. Que ce soient les longs relais ou les runs courts, ça venait toujours facilement. Alors on se met forcément à se poser des questions, par exemple : ‘Est-ce qu’on roule léger quand les autres roulent lourds ?’ Le moment de vérité, c’est toujours les qualifications.”

En matière de performance pure, Aston Martin était clairement un top team en début de saison, deuxième force du plateau avec six podiums lors des huit premiers Grands Prix pour Fernando Alonso. Mais ce statut ne s’acquiert pas si facilement selon Krack. “Il est juste de dire que nous avons fait un pas en avant, mais nous savons aussi que pour nous battre avec des écuries comme Ferrari, Mercedes et Red Bull, nous devons en faire quelques autres”, indique le Luxembourgeois.

Lewis Hamilton, Mercedes F1 W14, Fernando Alonso, Aston Martin AMR23

Fernando Alonso (Aston Martin) derrière la Mercedes de Lewis Hamilton

“Nous n’y sommes pas encore. Certes, la voiture était très bonne au début [de la saison], mais les autres ont rattrapé leur retard. Cela nous a très vite montré nos limites”, ajoute Krack, qui ne mentionne évidemment pas la théorie plausible selon laquelle le déclin récent des performances serait surtout dû à un serrage de vis de la FIA sur les ailerons flexibles. Il ajoute, non sans lancer une pique à Alpine : “Il y a des écuries qui sont toujours devant, et nous devons faire nos preuves avant de parler d’un plan sur 100 courses ou sur cinq ans. Nous ne sommes pas un top team. Il faut d’abord développer l’écurie pour être dans cette catégorie. Nous ne sommes pas à ce niveau.”

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À plus long terme, Aston Martin a effectué des recrutements clés avec le directeur technique Dan Fallows en provenance de Red Bull et son adjoint Eric Blandin, qui vient de Mercedes. Cependant, cela n’est pas forcément l’essentiel – surtout dans un contexte de plafond budgétaire, dont seuls les trois salaires les plus élevés (hors pilotes) sont exclus.

“Je pense qu’il faut du personnel expérimenté à la tête de l’équipe, mais il ne s’agit pas forcément des superstars pour lesquelles il faut sortir un gros chéquier”, estime Krack. “Je pense qu’il est important, si nous voulons bâtir un avenir durable pour notre équipe, que la croissance vienne de la base, vous voyez ? Avec les meilleurs diplômés des universités. C’est là que se trouve l’avenir. Un gros chéquier peut acheter le succès à court terme, mais ce n’est pas durable.”

Quant à rattraper Red Bull, cela paraît utopique pour l’instant au vu du gouffre d’au moins une demi-seconde au tour qui s’est créé ces derniers temps, même si Krack ne désespère pas : “Il n’y a pas de miracle. Tout d’abord, ils ont un pilote d’exception – nous aussi [Max Verstappen et Fernando Alonso, ndlr]. En fin de compte, on voit qu’ils ont une voiture qui est juste un petit peu meilleure dans tous les domaines, et la somme de toutes ces choses un petit peu meilleures fait la différence. Je détesterais les voir gagner toutes les courses [de l’année], mais ils sont partis pour le faire. Alors essayons de les perturber autant que possible…”

Propos recueillis par Jonathan Noble

Fernando Alonso, Aston Martin AMR23, Sergio Perez, Red Bull Racing RB19

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