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Automobile : la France remet en question le principe des amendes européennes sur les normes de CO2

automobile : la france remet en question le principe des amendes européennes sur les normes de co2

Un ouvrier sur la ligne d’assemblage de la Yaris 4 (hybride électrique) à l’usine Toyota d’Onnaing, près de Valenciennes (Nord), en avril.

Les signaux et les cris d’alarme lancés par les constructeurs automobiles européens ont commencé à faire leur effet. Tout au moins en France. Paris cherche des pistes pour leur éviter de payer des milliards d’euros d’amendes fixées par l’Union européenne si les seuils d’émissions de C02 plus sévères en 2025 n’étaient pas respectés.

Au Sommet de l’automobile, un événement organisé à Paris en marge du Mondial de l’automobile, le tout nouveau ministre de l’Économie, Antoine Armand, semble s’être rallié à la cause des constructeurs et des fournisseurs européens. « Nous sommes en train d’explorer toutes les flexibilités nécessaires pour éviter de pénaliser nos constructeurs au moment le plus crucial de leur transition industrielle, a-t-il déclaré mardi. Les pistes doivent être robustes et partagées avec certains homologues. »

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Ces derniers mois, le lobby européen de l’automobile, représenté par l’Acea, s’est mobilisé pour renégocier les échéances prévues par Bruxelles. En effet, à partir de 2025, l’Union réclame que chaque constructeur totalise sur l’ensemble de ses ventes de l’année prochaine, un niveau de CO2 moyen inférieur de 15 % à celui fixé en 2021 : soit 93,6 g de CO2 par km au lieu de 115 g, selon les normes WLTP. Cet objectif pourrait être atteint si les ventes de véhicules 100 % à batterie étaient dynamiques. Ce n’est pas le cas depuis plusieurs mois. Leur part de marché se situe actuellement à 12 %. Elle devrait atteindre 24 % pour rejoindre la trajectoire imaginée par l’Union européenne.

Préserver l’emploi et l’industrie

Au point que des montants de pénalités astronomiques ont commencé à être estimés : 15 milliards pour l’ensemble des constructeurs, a évalué Luca de Meo, le directeur général de Renault, à la tête de l’Acea jusqu’à la fin décembre. En septembre, l’association avait justifié sa position : « La tendance continue à la baisse de la part de marché des voitures électriques à batterie au sein de l’UE envoie un signal extrêmement inquiétant à l’industrie et aux décideurs politiques. Les constructeurs automobiles européens, réunis au sein de l’Acea, demandent donc aux institutions de l’UE de proposer des mesures d’urgence avant que les nouveaux objectifs de réduction des émissions de CO2 pour les voitures et les camionnettes n’entrent en vigueur en 2025. »

Antoine Armand s’en est fait l’écho mardi matin : « Les sanctions ne peuvent pas faire abstraction du contexte économique de l’emploi et du développement de notre industrie en France et en Europe. Des amendes de plusieurs milliards d’euros à l’échelle européenne limiteraient d’autant, non pas seulement nos objectifs, mais nos capacités d’investissement dans le verdissement. Et ces amendes auraient, je crois, des répercussions sur l’ensemble des fournisseurs qui sont déjà partout en France sous forte pression. » Quelles options pourraient alors être proposées à l’exécutif européen ? L’Acea suggère que l’objectif prévu en 2025 soit décalé de deux ans pour pouvoir être respecté sans mettre en péril la rentabilité des entreprises.

Des incitations à l’achat sur la durée

Mais ce recalage européen n’est pas au goût de tous les industriels. Lundi, Carlos Tavares, le patron de Stellantis, rappelait que son groupe avait tout mis en place pour se conformer aux règles européennes. « Faut-il rétropédaler sur l’électrique en Europe ?, faisait-il mine de s’interroger. Je n’en sais rien, ce que je sais, c’est que les règles sont connues depuis 2019. On s’est mis au travail et on en a payé le prix. Aujourd’hui, nous sommes prêts. Nous aurons 40 véhicules électriques sur le marché à la fin de l’année. La veille du grand jour, certains disent qu’ils ne sont pas prêts. Je leur dis : “Qu’avez-vous fait pendant tout ce temps ?”»

En parallèle, les industriels réclament des mesures de soutien pour revigorer les ventes de véhicules électriques en Europe. Les incitations doivent être maintenues dans la durée pour compenser le surcoût des véhicules électriques. Le cas de l’Allemagne, qui a vu s’effondrer les ventes de voitures électriques après l’arrêt des primes à l’achat, est l’exemple à ne pas suivre.

En France, où le projet de budget va entrer en discussion au Parlement, le ministre de l’Économie a assuré que le bonus écologique serait maintenu. L’enveloppe de soutien à l’achat de véhicules électriques doit toutefois passer de 1,5 à 1 milliard d’euros en 2025. Mais Antoine Armand regrette que seulement 20 % des voitures achetées bénéficiant du bonus soient produites en France. « Nous pouvons faire mieux », a-t-il lancé.

Le ministre est également revenu sur le malus automobile prévu dans le projet de budget du gouvernement avec un alourdissement échelonné ces trois prochaines années pour atteindre au final 80 % des véhicules mis sur le marché. Les professionnels de l’auto, vent debout, sont montés au créneau ces derniers jours dénonçant une « double peine ». Antoine Armand a convenu que ce projet élaboré « dans des délais extrêmement brefs » était « perfectible ».

L’argumentaire de la double peine a même été repris par le ministre : « Vous ne pouvez pas vous retrouver dans un étau serré, constitué d’une part par les pénalités sur trop peu de véhicules électriques, et d’autre part par les pénalités sur trop de véhicules thermiques », a déclaré Antoine Armand aux représentants de la filière. « Les injonctions contradictoires ne peuvent pas éternellement reposer sur ceux qui créent des emplois et de l’activité économique dans le pays. » Du miel offert à l’auditoire.

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