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"Encore largement dépendant": la France a toujours du mal à se passer de pétrole

Des pénuries de carburants dans près de 30% des stations

La France est sur le bon chemin vers la sortie des énergies fossiles mais doit désormais accélérer. Ce constat vaut également pour les énergies liquides comme le pétrole alors que la baisse de la consommation de produits pétroliers s’est confirmée en 2023.

D’environ 65 millions de tonnes l’année dernière, elle est en recul de 1,6% sur un an et de 10,6% par rapport à 2019, dernière année de référence pré-Covid, selon l’Union française des industries pétrolières (UFIP Energies et mobilités) qui organisait mardi matin sa conférence annuelle.

Plus d’essence, moins de gazole

Dans le détail, la consommation de carburants routiers a diminué de 2,6% par rapport à 2022 et de 4,1% par rapport à 2019. En ce qui concerne les livraisons, elles ont augmenté de 5,3% pour le sans plomb mais baissé de 5,5% pour le gazole, toujours par rapport à 2019.

Dans le paysage des station-services dont le nombre est passé sous la barre des 11.000, les remises exceptionnelles de 2022 n’ayant pas été reconduites ont permis aux grandes et moyennes surfaces de regagner des parts de marché sans pour autant retrouver leur niveau de 2021.

Le pétrole reste omniprésent dans les transports

A l’échelle mondiale, l’Hexagone ne représente que 1% de la demande de pétrole avec 1 million de barils consommés par jour. La France ne produisant que 10.000 barils par jour, elle a donc largement recours aux importations.

L’année dernière, 23 des 35 millions de tonnes de carburants consommés ont été importées. A la source d’approvisionnement majeure que représentait la Russie avant 2022 se sont substitués de nouveaux fournisseurs, en particulier la zone portuaire d’Amsterdam, Rotterdam et Angers mais aussi le Moyen-Orient.

“On est encore largement dépendant des énergies liquides”, constate Olivier Gantois, président de l’UFIP EM.

Ces produits liquides représentent 43% de l’énergie finale consommée en France. Dans le seul secteur des transports, ils pèsent 98% de l’énergie utilisée avec une très large majorité de carburants pétroliers (91% pour 7% de biocarburants).

Les statistiques des véhicules électriques ou hybrides rechargeables illustrent cette domination continue du pétrole: alors que plus d’un million sont aujourd’hui en circulation, ils ne comptent que pour 3% de l’ensemble du parc français malgré le déploiement des points de recharge électrique (120.000 actuellement) qui gagnent en puissance.

Passer d’une baisse de la demande d’énergie liquide de 2% à 6% par an

Pour réduire cette dépendance aux énergies fossiles, l’UFIP se range derrière l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et estime qu’un changement profond du mix énergétique est indispensable d’ici 2050 alors que la demande mondiale doit atteindre les 108 millions de barils par jour dans les prochaines années.

“Pour l’instant, on n’est pas encore sur la trajectoire du net zéro à horizon 2050”, observe Olivier Gantois.

Ce dernier anticipe même la mise en service de nouveaux champs pétroliers dans la conjoncture actuelle. Dans le scénario du net zéro, la part du pétrole devrait passer de 38% à 13% mais le scénario des politiques actuelles ne permettrait de la ramener qu’à 24%.

Cependant, le président de l’UFIP estime que la récente COP28 a représenté une étape d’accélération significative des ambitions en matière de décarbonation: les 198 pays participants ont pour la première fois appelé à l’unanimité à “une sortie progressive des énergies fossiles”. A l’échelle européenne, le paquet de mesures prévues dans le cadre du “Fit for 55” pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55% en 2030 par rapport à 1990 s’inscrit dans cette logique. Tout comme la stratégie française pour l’énergie et le climat (SFEC) qui fixe l’objectif d’une sortie des énergies fossiles dès 2050, une baisse de la consommation d’énergie finale de 40 à 50% à cet horizon ou encore une augmentation de 55% de la production d’électricité bas carbone.

“La baisse de la demande d’énergie liquide doit passer de -2% par an à ce jour (-1% par an sur les carburants) à -6% par an comme prévu dans la dernière programmation pluriannuelle de l’énergie”, souligne l’UFIP.

Carburants liquides bas carbone, hydrogène, capture de CO2

La participation des adhérents de l’UFIP à cette stratégie de décarbonation passe par différents leviers. Tout d’abord, le développement des carburants liquides bas carbone (CLBC) comme les biocarburants de première génération ou avancés, les carburants de synthèse ou à base de carbone recyclé. En 2022, environ quatre millions de tonnes de CLBC ont été incorporées et tout porte à croire que le nombre est encore en hausse en 2023 selon Olivier Gantois. Les industries pétrolières œuvrent également à décarboner l’hydrogène utilisé dans leurs activités de raffinage alors qu’elles représentent la moitié des 400.000 tonnes consommées chaque année en France.

Des projets émergent aussi dans le domaine de la capture et l’utilisation ou le stockage du carbone. Enfin, plusieurs acteurs investissent dans les nouvelles mobilités pour assurer la fabrication des batteries, la production de métaux rares ou la mise en place d’infrastructures de distribution. “Sans la sobriété et un changement profond des comportements et des usages, nous aurons du mal à être au rendez-vous des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre”, rappelle cependant l’UFIP.

“La défossilisation aura lieu si la demande d’énergies fossiles baisse”, insiste son président.

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