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Voiture accidentée thermique, hybride ou électrique: quand peut-on refuser de la réparer?

Généralement, après un sinistre, on souhaite que son auto soit remise en état au plus vite. Or, il existe des cas de figure où il ne faut surtout pas se précipiter et la réparer car elle a pu subir des dommages invisibles et insidieux pouvant la rendre dangereuse. Explications.

voiture accidentée thermique, hybride ou électrique: quand peut-on refuser de la réparer?

CH.IGOUNET

Depuis l’arrêté du 29 avril 2009, les experts en automobile doivent se prononcer sur la réparabilité technique des véhicules. Le but est de retirer de la circulation une voiture trop endommagée suite à un sinistre ou ne pouvant plus présenter toutes les garanties de sécurité même après réparation. On parle alors de véhicule TNR (Techniquement Non Réparable(1)). Une vraie avancée en matière de sécurité routière. Seulement voilà, les critères fixés alors n’étaient pas assez exhaustifs ni, surtout, adaptés aux derniers équipements embarqués et aux nouveaux modes de propulsion hybride et électrique. Des lacunes enfin comblées dans un nouvel arrêté du 24 avril 2024 (voir encadré).

Auto Plus vous dévoile ces évolutions et les deux cas de figure où il ne faut jamais réparer son véhicule. Bonus : les arguments qui feront mouche face à un expert qui passerait outre.

Véhicules immergés

Personne n’ignore que l’eau ne fait pas bon ménage avec les connexions et les équipements électriques. Et ne parlons pas de l’eau de mer ! Lorsqu’un véhicule est immergé, même partiellement, les éléments électriques ou électroniques ayant reçu des projections peuvent connaître, parfois longtemps après, des dysfonctionnements allant du simple mauvais contact jusqu’au court-circuit, avec les risques que cela comporte (incendie, panne). Quelles conséquences désastreuses dans le cas d’un airbag qui ne se serait pas déployé suite à un défaut d’alimentation de son module de commande !

Avant Il était prévu que seuls les véhicules immergés au-dessus du tableau de bord pouvaient être déclassés en TNR. C’était oublier que nombre de composants électroniques sont situés au niveau du plancher, ou du moins assez en dessous du tableau de bord ! Idem pour les batteries de traction des véhicules électriques et hybrides. Malgré cette incohérence technique, et les “remontées” de nombreux experts et professionnels inquiets de devoir autoriser la remise en circulation de véhicules potentiellement dangereux, la situation a perduré 16 ans ! Etait-ce sous la pression des assureurs qui voyaient d’un mauvais œil d’être dans l’obligation de rembourser des autos ne présentant quasi aucun dommage apparent, et de les envoyer à la casse contre un euro symbolique ? L’INSERR (2) , l’un des organismes qui assurent la formation continue des experts, ayant pris conscience de cette aberration technique, avait adopté une position courageuse en demandant à ceux-ci de classer TNR tout véhicule dans lequel l’eau aurait dépassé les assises de sièges. Ce qui change tout ! Problème : la décision technique pouvait différer selon le cabinet d’expertise chargé du sinistre. Pendant toutes ces années, des milliers d’autos pourtant sérieusement noyées, en particulier lors de crues, ont été réparées ou revendues.

Désormais La notion de hauteur d’eau est abandonnée. Il suffit que les systèmes de commande des dispositifs des airbags et prétensionneurs, les systèmes d’aide à la conduite, la ou les batteries de traction ou les éléments sous haute tension aient été immergés pour que l’auto soit jugée techniquement irréparable. La difficulté est qu’une fois le véhicule sorti de l’eau, il peut sécher rapidement, ce qui rend ainsi les traces de l’immersion difficiles à déceler, a fortiori si l’expertise n’a pas lieu rapidement.

Notre conseil Prenez si possible des photos de la voiture en mauvaise posture, ou au moins avant que les traces ne s’effacent. Si elle a fait l’objet d’un remorquage hors de votre présence, demandez au dépanneur de vous transmettre les clichés effectués sur les lieux. La majorité en prend à titre conservatoire. En l’absence de ces éléments, exigez que des démontages ciblés des pièces sensibles soient effectués avant la remise en état de l’auto.

Projection de poudre d’extincteur

En cas de début d’incendie dans une auto, l’utilisation d’un extincteur de type ABC est salutaire. Le hic, c’est que la poudre projetée a tendance à s’infiltrer partout de manière quasi invisible et qu’elle est extrêmement corrosive, en particulier pour les circuits électroniques et la connectique. A tel point qu’un nouveau type de vandalisme “à la poudre d’extincteur” s’est développé depuis quelques années. Or, vider un extincteur dans l’habitacle, comme dans le compartiment moteur, peut avoir de graves conséquences sur la sécurité et ce malgré les éventuels nettoyages par des sociétés spécialisées. Et les risques sont réels ! Imaginez qu’un calculateur d’injection se mette en défaut et coupe le moteur au moment où vous doublez !

Désormais La grande nouveauté de l’arrêté de 2024 est la prise en compte des altérations chimiques du réseau électrique et électronique. Un élément qui aurait reçu des projections de poudre, d’acide (batterie) ou de lubrifiant, qui ne serait ni remplaçable ni réparable, condamnerait dorénavant le véhicule. Une bonne nouvelle pour la sécurité ! Mais attention : il pourrait là encore y avoir des divergences d’application. La Fédération française de l’expertise automobile (FFEA) a rédigé le 26 août dernier une note “juridique” à destination des experts pour leur expliquer comment bien appliquer ces nouvelles directives. Est-ce la peur que certains pèchent par excès de prudence et classent trop vite les autos en TNR, au grand dam des assureurs ?

Notre conseil En cas d’incendie, n’oubliez pas de noter dans la déclaration de sinistre à adresser à votre assureur qu’un extincteur à poudre a été utilisé. Et décrivez les zones touchées. S’il s’agit de vandalisme, faites-le noter noir sur blanc par les enquêteurs dans votre plainte, qu’il est impératif de déposer afin d’être indemnisé. De même, indiquez au réparateur le lieu où l’expertise doit être réalisée, sa responsabilité pouvant être engagée s’il laisse repartir une auto potentiellement dangereuse sans l’avoir signalée à l’expert.

1. L’auto doit être désassemblée par un centre VHU (véhicule hors d’usage) agréé et son certificat d’immatriculation détruit. 2. Institut national de sécurité routière et de recherches.

En bref, les nouveaux critères d’irréparabilité technique

1. Véhicule complètement brûlé : compartiment moteur ou habitacle détruit.

2. Véhicule totalement immergé, ou dont les systèmes de commande et les éléments périphériques de fonctionnement des dispositifs de sécurité des personnes, les batteries de puissance ou les accumulateurs d’énergie ou tout système haute tension ont été immergés.

3. Véhicule dont un élément de sécurité n’est ni réparable ni remplaçable, soit :

Tous les éléments de liaison au sol.

Les fixations et articulations des sièges.

Les coussins gonflables, prétensionneurs, ceintures de sécurité et leurs éléments périphériques, les systèmes d’aide à la conduite relatifs à la sécurité, notamment, lorsqu’ils ont subi une transformation irréversible, une immersion totale, une corrosion ou oxydation par projection de poudre d’extincteur ou de lubrifiant, ou ont été incendiés.

La coque et le châssis.

4. Véhicule dont un élément de structure et de sécurité est atteint de défauts techniques irréversibles et non remplaçable :

Affaissement du pavillon ou de ses montants, ou découpe d’un pied de caisse lors d’une désincarcération.

Ecrasement des traverses de structure soudées ou déformation excessive des longerons.

Corrosion chimique du réseau électrique/électronique du véhicule (poudre d’extincteur, acide, etc.).

Corrosion perforante des éléments de liaison au sol et/ou de leur point d’ancrage.

Absence de matière sur berceau en aluminium.

5. Véhicule dont la réparation nécessite l’échange de l’ensemble moteur boîte et coque ou châssis qui entraîne la perte de leur identité d’origine.

6. Véhicule définitivement non identifiable, après épuisement des moyens de recherche permettant de l’identifier.

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F.DUBRAY/MAXPPP

Dans certains cas de figure, n’acceptez pas que votre auto soit réparée. Vous pourriez amèrement le regretter.

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