Peu importe les avis envers ce type de véhicules, la tendance aux SUV toujours plus rapides, toujours plus puissants, n’est pas près de disparaître. Tout le monde sait pourquoi les constructeurs en sont friands : ils permettent de gros profits, ce qui est suffisant pour justifier les contradictions dont ils sont porteurs. En effet, est-il vraiment pertinent aujourd’hui de mettre sur le marché des engins aussi gros, aussi lourds, aussi puissants et aussi gourmands ? Mais comme il existe des gens assez aisés pour se les payer, ces mammouths de plus de 600 ch ne devraient pas disparaître tout de suite… et c’est maintenant au tour d’Aston Martin de faire son offre.
Le SUV sauveur …
La firme de Gaydon avait grandement besoin du DBX et il va de soi que plusieurs variantes doivent être proposées. Un modèle V6 à hybridation légère existe en Chine depuis l’an dernier, et lors du restylage en 2024, nous devrions voir apparaître une version électrifiée en Europe. Dans l’intervalle, le 707 a débarqué. En le présentant comme le SUV le plus puissant de la production actuelle (il semble pourtant que le Dodge Durango SRT Hellcat affiche 720 ch…), Aston Martin espère attirer les projecteurs et approcher les 4 000 ventes annuelles pour se rapprocher de Lamborghini qui a vendu de son côté 5 000 Urus en 2021. Dans le même temps, le 707 se veut plus rentable tout en piquant des clients au constructeur de Sant’Agata mais aussi à Porsche. Et s’il pouvait également attirer suffisamment l’attention pour que les clients ne pensent pas au futur Range Rover V8 Sport SVR à moteur BMW qui arrive d’ici 18 mois, ce serait parfait.
… s’enhardit
En raidissant de 55 % les liaisons à l’avant et en rigidifiant de 9 % la caisse, nous avions peur que le confort de roulage du DBX disparaisse sur le 707 mais il ne faut guère de temps pour se rendre compte que ce n’est en rien le cas. Idem pour le raidissement de 50 % des barres antiroulis actives afin de lutter contre la prise de roulis et garantir que ce 707 vire à plat en toutes circonstances. Là aussi, le résultat est spectaculaire au point que je trouve ce 707 plus indulgent et plus relaxant à basse vitesse que son petit frère moins puissant. Même avec ses jantes optionnelles de 23 pouces et ses pneus taille basse, il faut passer sur un sacré nid-de-poule pour ressentir la moindre vibration dans l’habitacle.
Si les jantes de 23 pouces sont une option (c’est 22 de série), le freinage carbone-céramique est lui de série.
Les changements apportés aux amortisseurs pneumatiques à trois chambres tout comme ceux apportés aux modes GT, Sport et Sport+ jouent un rôle mais la maîtrise du contrôle de caisse ainsi que le confort de roulage sont aussi à mettre au crédit des butées hydrauliques installées sur la suspension avant. Elles étaient montées sur les premiers prototypes du DBX mais n’avaient pas été retenues en production à cause de problèmes de fiabilité. Elles ont depuis réussi les tests et sont donc inaugurées par le 707 avant d’équiper toutes les autres versions ensuite. Leur objectif est également de juguler au mieux l’impact sur la direction des masses non suspendues pour le moins conséquentes lorsqu’un SUV de 2 245 kg et 707 ch est équipé de jantes de 23 pouces abritant des disques carbone-céramique (de série) de 420 mm de diamètre à l’avant et 390 mm à l’arrière. Le confort à basse vitesse est immédiatement remarquable, cela donne à l’auto un comportement très typé GT.
Pour accepter les 707 ch à 6 000 tr/mn et les 900 Nm de couple délivrés de 2 600 à 4 500 tr/mn, la boîte qui comporte toujours 9 rapports dispose désormais d’un embrayage humide et d’un paramétrage spécifique pour plus de réactivité tandis que la gestion de la puissance privilégie beaucoup plus l’arrière que sur le DBX standard.
Il existe une fonction démarrage discret mais même sans cela et même sur son mode le plus sonore, cela reste compatible socialement. Même à pleine charge, son grognement explicite reste civilisé. Dans l’habitacle, ceux qui connaissent le DBX verront tout de suite les modifications. On trouve désormais une molette sur la console centrale pour sélectionner les modes de conduite, l’écran central n’est toujours pas tactile (cela viendra en 2024), mais les nouveaux sièges sport vous enveloppent un peu plus au niveau des épaules et proposent surtout une plus large gamme de couleurs qui rehaussent la qualité d’accueil de ce bel intérieur.
Meilleur en tout
Même si le pic intervient 400 tr/mn plus tard que sur le DBX standard (et cesse 500 tr/mn plus tôt), la quantité de couple délivrée à bas régime est supérieure, ce qui rend le 707 plus tranchant et plus réactif. Passez de Sport à Sport+ et le V8 se réveille, les montées en régime se montrent plus franches et la prise de vitesse très rapide. La direction linéaire et le châssis serein aident à garder son calme tout comme le niveau de grip offert par les Pirelli P Zero en 275 mm de large à l’avant et 310 à l’arrière. Si vous vous calez sur un bon rythme sans brusquerie, le 707 se montre plus communicatif et plus engageant qu’une Audi RS6. Il paraît plus organique et plus naturel dans sa façon de se comporter, et ne laisse jamais entrevoir la technologie qui lui permet d’avoir cette attitude sur la route. Ce package technologique n’interfère jamais tandis que sa transmission intégrale, optimisée pour s’adapter à la hausse de puissance et de couple, privilégie le train arrière jusqu’à ce que le manque d’adhérence oblige à envoyer une partie de la puissance vers l’avant. Ainsi, les sorties de courbe deviennent étonnamment équilibrées et naturelles. Dans le rapide, il se cale joliment dès l’inscription jusqu’à ce que vous repreniez les gaz, et jamais il ne se montre pointu ou délicat à emmener. On se surprend à apprécier ses qualités au-delà de ce que l’on pouvait l’imaginer avant d’en prendre le volant.
Satisfaisant tout le temps
Les sièges Sport sont de série mais des modèles plus confortables sont également possibles.
Chaque kilomètre passé au volant du 707 fait grimper la satisfaction. Certes, un puriste des sportives lui trouvera toujours des défauts. Cela reste une grosse auto même si, comme tous les engins dynamiquement réussis, elle vous donne la sensation d’être moins imposante volant en mains. La qualité de son amortissement à n’importe quelle vitesse, sa précision et la confiance relative qu’elle procure en courbe ne suffisent pas à vous enlever de l’esprit qu’une machine de près de 2,3 tonnes et de plus de 5 m de long, 2 de large et 1,7 de haut ne peut résister éternellement aux lois de la physique. D’autant que l’action des barres antiroulis actives a parfois tendance à trop affermir la suspension en appui, ce qui donne la sensation que l’auto est déconnectée de la route. Et pas au meilleur des moments.
Jamais il ne se montre nerveux ou délicat à emmener
On est quand même surpris que ce DBX707 n’essaie jamais de vous effrayer ou de vous impressionner juste “pour faire le job”. Sa mise au point est tout sauf superficielle, c’est un engin facile à vivre qu’il est difficile de ne pas apprécier. Il est plus raffiné et polyvalent qu’un Porsche Cayenne Turbo GT ou qu’un Lamborghini Urus, moins axé sur la performance absolue. Il a sacrifié un peu de frisson au profit d’une expression plus en rondeur, plus riche.