Vous vous souvenez de la première Porsche RS ? La 911 2.7 avec sa petite « queue de canard » de 1972 ? Pile 50 ans plus tard, la nouvelle 911 (type 992) Renn Sport n’a plus rien à voir et surtout plus honte de son appendice aérodynamique. La voici qui débarque affublée d’un énorme aileron, 40% plus grand que celui d’une GT3 RS d’avant, doté d’une lame pilotée pour augmenter au choix la déportance – que l’on décrit le plus souvent comme « l’appui » – ou réduire la trainée. Un choix technique audacieux, déjà vu chez Mercedes notamment avec l’AMG GT Black Series, dicté par ce besoin insatiable d’aller exploser les chronos sur le Nürburgring. À l’heure d’écrire ces lignes, le temps « officiel » de cette nouvelle 992 GT3 RS n’a pas encore été communiqué. Mais il se murmure en coulisse, qu’aux premiers stades de son développement, la GT3 RS était moins rapide en ligne droite qu’une GT3 « normale » alors qu’elle sortait plus vite des virages… D’où l’arrivée du système DRS – Drag Reduction System – comme en F1, pour corriger le tir.
Concept
Quel que soit l’angle sous lequel on l’observe, la 911 GT3 RS impressionne. Le fruit de ses nombreuses protubérances aérodynamiques bien-sûr, mais aussi de ses voies élargies (30 mm) et de ses énormes jantes de 20’’ (à l’avant) et 21’’ (à l’arrière) qui ne sont plus totalement enveloppées par la carrosserie. Les persiennes (louvers en anglais) qui surplombent les roues avant, les ailettes verticales (sideblades) disposées au 4 coins de la caisse et les ailes avant creusées comme celles d’une vraie voiture de course, tout transpire ici la performance et il n’y a pas 1 cm2 de la voiture qui ne soit traité dans un souci aérodynamique. Excepté les poignées de porte… qui ne sont plus intégrées ici comme celles des dernières 911 mais bien identiques à celles du modèle d’avant. La raison ? La 911 GT3 RS a pour la première fois droit à des portes en carbone, peu compatibles avec ces mécanismes compliqués.
Des réglages qui ne sont, certes, pas à la portée du premier Gentleman Driver venu mais qui, avec un peu d’application et/ou la science d’un pilote plus aguerri permettent de façonner le châssis de la GT3 RS comme celui d’une vraie voiture de course. Reste à parler du moteur, lui aussi préparé pour la RS. Grâce à de nouveaux arbres de distribution dotés de cames plus agressives, à un système d’admission à papillons individuels et à un radiateur de refroidissement unique à l’avant – en lieu et place du bac de coffre qui disparait donc sur la GT3 RS – il développe 525 ch à 8.500 tr/min. Soit 15 ch de plus disponibles 100 tr/min plus tard que sur une GT3 « de base ».
Conduite
Les pneus Michelin Pilot Sport Cup 2 (de 275 mm de large à l’avant et 335 mm à l’arrière) étant surtout prévus pour offrir du grip sur sol sec, ce sont hélas eux qui vont très vite fixer les limites du test. Pas évident d’aller chercher l’appui – ou la déportance, donc – dans les longues courbes lorsque on y entre déjà à la limite de l’aquaplaning… Qu’à cela ne tienne, on jouera avec le DRS une autre fois, et on se concentre surtout sur les sensations de conduite. Premier constat : la GT3 RS semble encore plus incisive en entrée de courbe. L’effet 4 roues directrices sans doute, et le fruit surtout d’un train avant sans cesse plus affuté. Une fois verrouillée sur ses appuis, la 911 s’agrippe à la corde comme une sangsue et n’attend que la fin du vibreur pour partir à l’assaut du virage suivant. Á vitesse contrainte, l’appui aérodynamique accru est forcément peu perceptible mais on sent tout de même le châssis plaqué au sol, comme attiré par une force magnétique. À la réaccélération, il faut doser gentiment, et ne pas viser à tout prix les 9.000 tr/min… sous peine de sortir du virage avec l’aileron devant.
En mode Track, l’ESP offre pas mal de latitude au décrochage (pas jusqu’au Drift, mais presque) mais le mode Sport, plus doux sur sol mouillé, nous a semblé plus approprié pour jouer avec la RS dans ces mauvaises conditions. Un bout de ligne droite un peu épargné par la nappe de pluie, on pousse les rapports jusqu’à 200 km/h et c’est l’occasion de se rappeler à quel point ce flat 6 atmosphérique a la poussée franche, l’allonge facile et le timbre de voix infiniment jouissif. Au freinage, il faut à nouveau prendre pas mal de marge, mais au-delà du sol délicat, la puissance à la pédale semble toujours au rendez-vous. Avec les gros disques en carbone (une option à 10.028 €) installés sur notre voiture d’essai, il serait dommage qu’il en soit autrement. À noter que, sans cela, la 992 GT3 RS est toujours livrée avec des disques en acier. On peut parler d’une vraie mesquinerie sur une auto dédiée tout entière à la performance sur circuit et dont le prix dépasse désormais… les 240.000 € !
Verdict
Pas facile de jouer avec l’aérodynamique lorsque l’eau déborde de la piste et que les pneus sont saturés. Ce premier contact avec la Porsche 911 GT3 RS sur un circuit de Silverstone détrempé nous laisse un goût amer, celui de n’avoir pas véritablement pu sonder ses (énormes) capacités… Qu’à cela ne tienne, de ce que l’on a vu, on peut dire que la GT3 RS n’a à tout le moins rien perdu de ses excellentes aptitudes à la piste ni de son tempérament de feu. En sus, la nouvelle venue vous donne les moyens – notamment par son châssis évolué, son aéro active, ses suspensions et son diff’ réglables – d’élever votre pilotage encore un cran plus haut, voire vous emmène carrément vers une autre dimension. Allo, Porsche ? Il vous reste encore une place pour un essai de la 911 GT3 RS… à Monza ?
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Une publication partagée par Cedric Derese Moniteur Automobile (@thebelgiandriver)