En 1986, l'héritière de la Delta S4 de rallye était équipée d'un moteur de plus de 800 ch qui anticipait la suralimentation à deux étages.
Pour les passionnés de rallye, mais aussi pour tous ceux qui en ont simplement entendu parler, l’ère du Groupe B, dans les années 1980, est peut-être la plus passionnante de l’histoire de cette discipline du sport automobile.
Beaucoup, voire trop, de puissance offerte à des prototypes légers ressemblant vaguement à des voitures de série et des solutions techniques souvent poussées à l’extrême ont rapidement montré des limites de sécurité.
L’ambition de Lancia
Parmi les voitures du Groupe S n’ayant jamais vu le jour, il y a celle qui devait remplacer la Lancia Delta S4. Elle est née en 1986 avec les initiales ECV mais s’est arrêtée au stade de prototype. Parmi ses secrets, outre sa structure composite, l’ECV possédait un nouveau moteur très puissant doté d’une technologie de suralimentation spéciale, appelée Triflux, qui permettait un déploiement de puissance jamais vu auparavant.
Lancia ECV prototipo 1986
Les secrets du Triflux
La base était la même que celle de la S4 : un quatre cylindres 1.8 (pour être précis, 1 759 cm3) déjà équipé à l’origine d’une double suralimentation, c’est-à-dire d’un turbocompresseur KKK K-27 avec une pression de 2,5 bars pour les régimes moyens à élevés et d’un compresseur volumétrique Volumex R18 actif dès 1 500 tr/min, assistée d’un double intercooler. Sur la S4, la puissance dépassait les 600 ch.
Il motore e gli intercooler della Lancia Delta S4 Stradale
Comme sur les turbos à deux étages modernes, le système fonctionne en dirigeant le flux des gaz d’échappement d’abord vers une turbine, pour la préparation à bas régime, puis, après 5 000 tr/min, en le répartissant sur les deux turbines, qui travaillent en parallèle pour atteindre la puissance maximale. D’où le nom de Triflux, qui indique précisément la présence de deux flux distincts pour les gaz d’échappement et un pour l’air d’admission.
Ce n’est pas tout : pour pouvoir installer les deux turbos, la culasse à quatre soupapes par cylindre a été redessinée selon un schéma de flux croisé : cela signifie que les soupapes d’admission, ainsi que les soupapes d’échappement des cylindres, ne sont pas disposées du même côté, mais en alternance. Cela permet au moteur d’avoir une température homogène, une dilatation plus régulière, d’augmenter la compression et la pression du turbo, et de générer des turbulences favorables dans les chambres de combustion.
Le moteur Triflux est capable de générer une puissance qui varie, selon les réglages, de 600 à environ 800 ch, voire plus, mais il est surtout très vif. Il est si brutal qu’il a impressionné les pilotes d’essai qui ont testé le prototype et qui, des années plus tard, ont reconnu qu’un véhicule doté d’une telle accélération serait extrêmement dangereux sur des pistes non fermées au public.